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19 juin 2012 2 19 /06 /juin /2012 18:34
Les vendanges à Beaumont

Entonnage du vin. Mosaïque, Saint-Denis.

 

 

 

Les vendanges

 

à

 

BEAUMONT

 

(du Moyen Âge au XIXe siècle)

 

--o--

 

Réglements, conflits, amendes et...

réjouissances.

 

 

 photo1-stverny.jpg

 

Statue de Saint-Verny,

église Saint-Pierre de Beaumont

 

--o--

                                                                                 

Jacques Pageix 2012

 

 

 

1-Avant-propos

 

On sut très tôt que pour obtenir un vin de qualité, le raisin devait être parvenu à sa complète maturité. Toutefois, le vigneron, craignant la grêle, les dégâts des oiseaux ou les maladies de la vigne (mildiou, oïdium, etc.), avait quelquefois tendance à anticiper sur le moment le plus approprié.

 

La nécessité de réglementer les vendanges se fit donc très vite sentir et l'on institua le "ban des vendanges".

 

Sous l'Ancien Régime, il consistait pour les seigneurs à proclamer le début des vendanges et a en fixer leur déroulement en désignant les terroirs devant être successivement vendangés, non sans avoir rappelé les amendes encourues par ceux qui ne les respecteraient pas...

 

Il ne faut pas non plus oublier que les seigneurs avaient tout intérêt à ce que les vendanges fussent concentrées successivement en des lieux désignés d'avance afin d'éviter une dispersion qui n'aurait pas facilité la perception de leurs dîmes (1). Ceci explique donc leur détermination à conserver cette prérogative.

 

A partir de 1790, le ban des vendanges fut proclamé par un arrêté de la municipalité, visé par le Préfet.

 

2-Le ban des vendanges au fil des siècles

 

Le plus ancien ban des vendanges que j'ai pu retrouver dans les archives de l'abbaye de Beaumont, date de 1499. On vendangeait alors par « pans », c'est à dire par secteurs regroupant plusieurs terroirs voisins. Voici ce document tiré des archives de l'abbaye de Beaumont et sa transcription (2).

 

photo2-1bans1499-copie-1

 

photo2-2bans1499-22

 

photo2-3bans1499-3

 

Le ban des vendanges de septembre 1499.

Montage et transcription Jacques Pageix

 

Une annotations manifestement portées plus tard (l' écriture est du XVIIe siècle), se trouve en marge du texte du XVe siècle; elle est retranscrite en italique:

 

« Limitations des pans et territoires des vignes pour L ouverture d Iceux pour les vendanges a l avenir suivant et en execu(ti)on de la transaction passee entre madame l abbesse Et les Eleus et habitans de beaumont".

 

La numérotation en gras ajoutée sur la transcription renvoie au plan présenté plus loin où j'ai indiqué par ces mêmes numéros les zones vendangées au fil des jours :

 

Voici ma transcription de ce texte :

 

(F°5v°):

 

« Les pans menciones et declares aux lectres de translacion ont ete limites ainsi que s ensuit

 

(1-2-3) « Premierem(en)t a este appoincte q(ue) le p(re)mier pan co(m)encera despuis la porte Real Jusques a la croix du masage Et de lad(ite) croix du masage au teroir de la volpilhera Suyvant le chemin Dauroiel (Les Rivaux) Jusques au pont eymery et de lad(ite) crois du masage Jusques a la Riviera d artiera dud(it) beaumont

« Cy sont les t(er)roirs quy sont (com)pris dans led(it) pan p(re)mier

 

(4-5-6) « Et p(re)mierem(en)t les t(er)roirs de las veyrias de las testas las mouretas bon Roche et tous les (comunaulx?)

 

(7-8-9) « L aut(re) pan comencera despuis lad(ite) porte Real Jusque a la croix des lundars (les Liondards) en allant a clermont

« cy sont les t(er)roirs dud(it) pan

« Les terroirs de la garde Soutrana et de P(ier)re Roye (Pierre Rouge)

 

(10-11-12) « L aut(re) pan acomencera a la font de fromage tirant au t(er)roir de las chaussades et tirant au telh de Sainct guille(aume)

« Cy sont les terroirs

« Les terroirs de las colonges de la penderia et tout g(ar)de velhe (Garde Vieille)

 

(13-14-15) « L aut(re) pan comencera au teyroir de las chaussades tirant le chemin du matarel Jusques au trevys (carrefour de chemin)

« Cy sont les t(er)roirs

« C est assavoir mo(n)tpouly la velse (la Verre ou Lavert)  montbayol

 

(16-17-18-19) « L autre pan comencera au teyroir de las chaussades Jusques a la Riviera dud(it) beaumont

« Les t(er)roirs sont

« C est assavoir le Matareau (le Matarel) la courbe la Roche et la lunginya (les Longines)

 

(20-21-22-23« L autre pan toutes les vignes que sont de la Riviera dud(it) beaumont

«Les t(er)roirs  sont

« C est assavoir les Rongieres les faisses (Las Fouessas, les Foisses) le Sout et prolhiat »

 

Ce vieux texte des bans de 1499 fut inséré manifestement à dessein dans les registres de justice du monastère. On souhaitait ainsi entériner une fois pour toute, à l'issue du long procès évoqué plus loin, une sorte d' «arrêté-type» constituant une référence en cas de nouveau litige entre l'abbaye et les habitants.

Il m'a permis, après identification et localisation des terroirs désignés, de suivre l'itinéraire des vendangeurs:

 

photo3.JPG

     

Reconstitution Jacques Pageix-Reproduction interdite.

 

J'ai représenté sur ce plan la répartition des cultures au XVIIIe siècle sur le territoire de Beaumont (pour plus de clarté, les bornes n'y ont pas été indiquées).

On y distingue les vignes (naturellement dominantes), les vergers le long de la rivière d'Artière, les champs et les communaux (à l'extrémité ouest).

La réserve seigneuriale comprenait les terroirs de Champ-Blanc, la Rongeyre, la Condamine, du Petit et du Grand Coin.

Après la vente des biens de l'abbaye dont certains beaumontois se portèrent acquéreurs, ces terroirs furent évidemment inclus dans les bans promulgués par la suite. Leurs noms furent changés entre-temps en Bernard-Maître et Champ de Madame...

 

Dans une étude non encore publiée, j'ai retracé la façon dont s'effectuait la proclamation du ban des vendanges et le déroulement de celles-ci au XVIe siècle. En voici un extrait (3):

 

Lorsque le raisin arrivait à maturité, les élus sollicitaient de l’abbesse ou de ses officiers la permission d’assembler les habitants pour fixer la date et le déroulement des vendanges.

 

Les beaumontois se réunissaient alors dans la maison du Saint-Esprit, et désignaient douze sages chargés d’inspecter les vignes. Afin, peut-être, de ne point susciter de jalousie entre les deux paroisses, on élisait six hommes de Saint-Pierre et six autres de Notre-Dame de la Rivière...

 

Après avoir prêté serment devant l’abbesse ou ses officiers de “ bien et loyalement visiter les vignes ”, ces douze experts s’acquittaient de leur mission en allant “ visiter les territoires et viniobles estans dans la dicte justice de beaumont pour veoir si les raisins estoient meurs pour le cullir et amasser ”. Ils faisaient ensuite leur rapport à l’abbesse, en lui proposant la date qui leur semblait la plus favorable.

 

Le monastère se ménageait un délai de deux ou trois jours avant la date fixée afin de préparer ses caves et son matériel, de prévoir des gardes en nombre suffisant pour surveiller les vignes, et de réunir les bêtes de somme nécessaires au transport des dîmes.

 

Une ordonnance abbatiale, criée par un sergent, proclamait ensuite le ban des vendanges, c’est à dire la liste des terroirs que l’on devait successivement vendanger. On disait alors que l’on vendangeait “ par pans ”.

 

Les gardes dépêchés par le monastère, que l’on appelait les “ dixmiers ”, veillaient tout particulièrement à ce que les “ pans ” fussent vendangés les uns après les autres, conformément à l’ordonnance.

 

Si un vigneron s’avisait de vendanger sans respecter l’ordre prévu, on disait qu’il “ enjambait les pans ”. Toute infraction à ces règlements était passible d’une amende.

 

Ces précautions permettaient à l’abbaye de porter tous ses moyens matériels et humains sur un espace restreint, fixé à l’avance, afin de collecter ses dîmes avec plus d’efficacité et à moindre frais.

 

Les témoins interrogés en 1494 fournirent d'ailleurs des explications claires à cet égard, qui furent consignées dans le registre d'enquête précité :

 

« Et dit le dict deposant que si les dictes vignes ne se vendangeoient pas par pans, les dictes demanderesses (les religieuses) (n') y auroient (pas) grand interest car il leur fauldroit avoir grand quantité de gardes pour garder les dixmes et quantité de bestes pour iceulx dixmes pourter à la dicte abbaye et avec ce perdroient beaucoup de leur dictes dixmes car elle ne leur dicts gardes ne y pourroient entendre et ne seroient que tout confusion et désordre »... Un autre témoin précise même qu’il « faulx tant que les vandanges dureroient, plus de cent gardes (pour préserver les dîmes) et plus de cent cheveaulx (pour les transporter) »...

 

Ces règlements relatifs aux vendanges eurent la vie dure, puisqu'on vendangea ainsi « par pans » jusqu'en 1852. Les vendanges se déroulèrent ensuite « en un seul pan pour tout le territoire communal », puis cette mesure fut définitivement supprimée avec la publication du dernier ban le 5 octobre 1866 (4).

 

Pour mon grand-oncle Joseph Pageix, cette réglementation présentait à la fois des inconvénients et des avantages. Voici ce qu'il écrivait à ce sujet (5):

 

« Cette mesure pleine de bon sens a été supprimée en 1865. Elle avait pour but de parer à l’imprévoyance des gens. On voit aujourd'hui des vignerons, affolés par la moindre fraîcheur matinale, se ruer sur leur récolte, la cueillir à moitié mûre, tirer leur vin quand d’autres songent à peine à « imbiber » cuves et bacholles. Ainsi, la même année, deux voisins de cuvage trouvent le moyen d’obtenir l’un du vin léger comme piquette, l’autre de celui dont les vieux disaient « zi ni mô do vi de mourâs » (il est noir comme du vin de mûre).

 

Les bans de vendanges mettaient un peu plus d’ordre dans cet état de choses en réglementant la cueillette des grappes. Certes, cette mesure avait des avantages incontestables. D’abord de permettre au village entier de faire une seule qualité de vin : la meilleure ; celle qui faisait dire à nos anciens en vidant une tasse d’argent : « coui de boünô büvento » (c’est de la bonne boisson). Ensuite de faire nettoyer les rues, car si les odorats subtils hésitent aujourd'hui à traverser certains de nos quartiers, qu’eussent-ils fait, il y a cent ans, alors que le traditionnel tas d’ordure montait sa garde invariable à la porte de chaque maison ? Enfin de faire réparer les chemins de culture, ou du moins d’en donner l’illusion, car chacune s’appliquait surtout à réparer devant sa propriété l’emplacement destiné aux bacholles, afin de pouvoir plus aisément ramasser les grains et les grappes que laissait tomber le bertier. Les mottes étaient jetées dans les ornières, et cela faisait très bien pour le coup d’œil sinon pour la solidité.

 

Mais tout n’allait pas sans quelques petits inconvénients, dont le principal était de porter tous les vendangeurs du pays sur le même point le même jour. Il en résultait quelques embarras, car on ne trouvait pas comme aujourd'hui une chaume tous les cent pas pour tourner ou garer les voitures ».

3-Les conflits qu'ils souleva

 

Le ban des vendanges fut mal supporté par nos ancêtres, que ce soit à Beaumont ou à Aubière. À Beaumont, au fil des siècles, les élus, puis les consuls, firent de nombreux procès à l'abbaye. Ce fut le cas notamment à partir de 1495, où les habitants intentèrent un procès au sujet des droits seigneuriaux qui incluait notamment le ban des vendanges...

 

Dans un mémoire tiré du fonds de l'abbaye de Beaumont , établi pour l'abbesse Marie de la Forest, on lit que « les habitants, sans qu'aucuns griefs ne leur ait été faits par les religieuses, se portèrent appelants car il voulaient que les pans (bans) ne fussent ordonnez a leur volonté", "droictz que lesdits habitans malicieusement s'estoient efforcez rendre litigieux", alors "qu'elles (les religieuses) avoient accoustumé bailler et decerner jour de vendanges et ordonner quelz pans et quartiers se vendangeoient au dit lieu ne quant ne comment et ce sur le rapport de douze preudhommes dudit beaumont. » (6).

 

 

Le préambule du mémoire en réponse que fit rédiger Marie de la Forest soulignait que « Les religieuses sont dames en toute justice haulte moyenne et basse dudit lieu de beaumont et est ladite abbaye de beaumont une belle ancienne et notable abbaye de fondation royale en laquelle y a costidiennement grand nombre de notables religieuses faisans et continuans nuyt et jour divin service pour la sustentation desquelles et support des charges de ladite abbaye il y a bien petite fondation et encores tendent lesdits habitans appellans qui sont leurs subjectz par force de contradictions formelles et voyes indirectes mectre a mendicité lesdites povres religieuses et leur faire perdre les droictz de leur dite abbaye dont elles ont accoustumé journellement avoir et tirer leur povre vie » (…) « Voyant lesdites Religieuses que soubz couleur dudit appel s'il estoit différé de passer oultre à ladite provision elles estoient destituées de tous leurs droitz et en voye de mendicité et mourir de faim » !...

 

 

Il faut ajouter que ce mémoire fut rédigé à l'issue d'une enquête diligentée par la Sénéchaussée qui dépêcha des commissaires à Beaumont, au cours du mois de mars 1494. Une dizaine de beaumontois jugés suffisamment sages, « aigés et de bonne mémoire » furent ainsi interrogés sur les droits seigneuriaux en vigueur à Beaumont, afin d'établir l'ancienneté de ces privilèges et de confirmer qui devait en bénéficier... L’un de ces témoins avait tout de même 80 ans, ce qui devait probablement constituer une exception à cette époque où l'on atteignait difficilement la quarantaine, pourvu que l'on eût échappé à la mortalité infantile et aux épidémies (la peste, que l'on trouve bien présente notamment autour de 1500, et qui est mentionnée de manière récurrente dans les archives, décimait les populations). Il est émouvant de lire les témoignages de ces vieux beaumontois nés à l'époque des chevauchées de Jeanne d'Arc !

 

Certes, l'existence de nos ancêtres était peu enviable puisqu'ils durent affronter les guerres, les disettes et les épidémies. Pour couronner le tout, ajoutons que cette sombre période fut marquée par des tremblements de terre assez violents (l'abbaye fut en partie détruite). Mais nous reviendrons une autre fois sur ce sujet...

 

Si l'on peut comprendre que la nature un peu vexatoire pour eux de cette prérogative abbatiale ait pu justifier leur attitude hostile, on peut penser néanmoins que les habitants exagéraient quelque peu quand ils voulaient s'approprier le ban des vendanges, car à l'époque, l'abbesse ne faisait décréter les bans par ses officiers qu'après avoir consulté les habitants par l'intermédiaire de douze "personnaiges idoynes et saiges" évoqués plus haut, qu'elle convoquait auparavant en son parloir...

 

En fait, cette contestation des habitants à l'égard du ban des vendanges s'inscrivait dans un ensemble de revendications touchant tous les droits seigneuriaux, tels que le fournage, le chevrotage, le courtage et le droit de noce... Il existe d'ailleurs dans les archives abbatiales un document au contenu assez savoureux sur un litige survenu entre un beaumontois, fraîchement marié, et l'abbesse qui voulait naturellement faire respecter son droit de noce; le marié avança pour sa part des arguments (ma fois assez convaincants) pour éviter de s'en acquitter (voir l'article sur le mariage à Beaumont).

 

Ces litiges étaient similaires à ceux que l'on retrouve pour les droits seigneuriaux à Aubière à la même époque (7).

 

4- Les sanctions 

 

Au Moyen-Âge, la justice abbatiale jugeait pêle-mêle lors de ses assises des infractions au ban des vendanges, des grapillages, ou l'absence de propreté lors des vendanges, les chemins et leurs abords n'étant pas correctement remis en état après le passage des chars, etc.

 

Voici quelques jugements relevés dans ces registres (8):

 

En septembre 1383, une amende de 3 sous est infligée à la femme de Hugues Daylhs pour avoir pris des grappes de raisins aux temps des vendanges nonobstant les défenses de la cour "grapetare in vineis temporem vindemiarem".

 

En septembre 1396, une amende est infligée à Jehan Gaury senior pour avoir pris une moycelle de raisins "infra suam vineam".

 

Le 5 octobre 1469, une amende est infligée à Jehane Renoux, femme de Bernard Renoux pour avoir emporté une saulme de vendange d'une vigne qui est à la percière de Madame au terroir du Ventadour (une saume était la charge pouvant être portée par un âne ou un mulet!).

 

Au même moment, une amende est infligée à Jehan Vitalis alias Richardi pour avoir fouetté un ébruiteur chargé de garder la dixme et les percières de Madame!

 

geo-fourrier

 

Vigneron de Chamalières vers 1920.

L'une des belles cartes postales de Géo Fourrier (coll. Jacques Pageix)

 

 

Faisons un bond en avant dans le temps et voyons comment réagissait l'autorité au XIXe siècle:

 

Sur le site de la BNF, Gallica, mon cousin d'Aubièren Pierre Bourcheix, a trouvé par hasard un arrêt de cassation prononcé en faveur de vignerons beaumontois qui avait été verbalisé lors des vendanges de 1832 pour non respect des bans publiés.

 

En lisant cet arrêt, daté du 31 janvier 1833, on ne peut douter que les vignerons du XIXe siècle considéraient toujours le ban des vendanges comme une contrainte, tout comme leurs ancêtres du XVe siècle...

Cet arrêt (voir le texte ci-après) concernait manifestement des viticulteurs dont les vignes vendangées étaient situées sur le territoire de la commune de Clermont, et qui furent donc verbalisés par les autorités de police de cette ville...

 

 

« BULLETIN

 

DES ARRÊTS

 

DE LA COUR DE CASSATION ,

 

RENDUS EN MATIERE CRIMINELLE

 

Année 1833,

 

PARIS

DE L'IMPRIMERIE ROYALE,

 

M DCCC XXXIV

 

BULLETIN DES ARRÊTS DE LA COUR DE CASSATION

MATIERE CRIMNELLE, N°1

 

 

(N°25.) ANNULATION, sur le pourvoi du Commissaire de police remplissant les fonctions du ministère public près le Tribunal de simple police de Clermont-Ferrand, département du Puy-de-Dôme, d'un jugement rendu par ce Tribunal , le 25 octobre dernier, en faveur des nommés Faye, Bernard, Cohendy, Pageix et autres.

 

Du 31 Janvier 1833

 

Les faits de la cause ; et les motifs qui ont déterminé la Cour à prononcer cette annulation sont suffisamment expliqués dans l'arrêt dont la teneur suit :

 

Ouï le rapport fait par M. de Crouseilhes, conseiller, et les conclusions de M. Parant, avocat général ;

Vu l'arrêté du maire de Clermont-Ferrand, portant règlement pour les bans de vendange, à la date du 3 octobre 1832 ;

Vu l'article 475 du Code pénal, paragraphe 1er ;

Attendu que le règlement dont il s'agit dans l'espèce portait à l'un des objets confiés à l'autorité municipale, et formellement rappelé par l'article 475, paragraphe 1er du Code pénal ;

Attendu que d'après les termes de l'arrêté et la délibération du conseil municipal qui lui sert de base, il est facultatif de vendanger la veille des jours indiqués pour chaque territoire, et que le samedi est considéré comme la veille du lundi ;

Attendu que c'est seulement relativement au lundi que l'on dispose dans cet arrêté que l'avant-veille sera considérée comme la veille ; que cette disposition tout exceptionnelle ne peut être étendue au-delà de ces termes ; en telle sorte que pour les autres jours de la semaine l'avant-veille soit considérée comme la veille ; et attendu qu'il est reconnu et constaté que les inculpés avaient vendangé le dimanche dans un territoire qui, d'après le règlement, devait être vendangé le mardi ;

Attendu que lesdits inculpés ont été renvoyés de la plainte, sur le motif qu'ils avaient pu vendanger le dimanche avant-veille du mardi ; par la même raison qui avait fait permettre de considérer le samedi comme veille du lundi ;

Et attendu, dès lors, que ce jugement a méconnu les dispositions du règlement du 3 octobre ; qu'en ne prononçant point contre les contrevenants la peine portée par l'article 475, paragraphe 1er, du Code pénal, il a violé cet article ;

Par ces motifs, LA COUR casse le jugement du tribunal de police de Clermont-Ferrand, en date du 25 octobre 1832 ;

Et pour être statué, conformément à la loi, sur les faits résultant du procès-verbal du 14 octobre dernier, renvoie la cause et les inculpés, Michel Faye, Jean Bernard, Guillaume Cohendy, Jean Cohendy, Jacques Pageix vieux, Jacques Pageix jeune et Costes par devant le tribunal de police de Montferrand :

Ordonne, &c. – Fait et prononcé, &c. --Chambre criminelle.

 

Nota. LA COUR a rendu a la même audience, et sur le pourvoi du même commissaire de police, un second arrêt qui casse par les mêmes motifs, le jugement rendu le même jour, 25 octobre 1832, par le tribunal de simple police de Clermont-Ferrand, en faveur des nommés Daury, Tartarat, Jargaille, Renard, Bayse, Bayeron, Bonnefoy, Rabassy et Falateux (Falateuf).

5- Les festivités liées à la vigne

 

Dans son ouvrage déjà cité, mon grand oncle Joseph Pageix regrettait la disparition à Beaumont de la coutume des processions, « cet acte de foi solennel de tout un village » qui mobilisait les habitants des deux anciennes paroisses (Saint Pierre et Notre Dame de la rivière, qui avaient conservé leurs rites propres). Ces processions étaient l'objet de minutieux préparatifs qui impliquaient les bailes des confréries visées et les fabriciens (autrefois luminiers) des deux églises. Joseph Pageix évoquait notamment la procession de Saint Verny en ces termes (9) :

 

"Processions de Saint Verny, patron des vignerons, le dimanche suivant immédiatement le 20 Mai, date à laquelle tout bon disciple du Saint ne devait plus avoir un lien d'osier à faire à ses vignes. Il n'était pas toujours facile d'être exact à ce terme, surtout quand la saison avait été rude, à cette époque où pas un seul échalas ne passait l'hiver planté dans la terre. Nos pères l'arrachaient quand les premières gelées avaient dépouillé la vigne de ses feuilles. Ils le rassemblaient soigneusement en baues (10), où il serait à l'abri de l'humidité et de la pourriture, et le replanteraient au printemps. Et il était de coutume de dire que, de la croix qui lui était dédiée au terroir de la Penderie*, où l'on portait sa statue enguirlandée de magnifiques pampres verts, Saint Verny embrassant d'un coup d'œil tout son domaine voyait toutes les baues encore debout des retardataires, et ne manquait pas de mettre ceux-ci à l'amende.

 

Mais, comme il était bon Saint, et qu'il connaissait fort bien les choses de la terre - car la légende locale nous apprend qu'avant que le bon Dieu l'appelât au rang qu'il occupe dans son Paradis, Saint Verny était tout simplement un brave homme de vigneron qui avait saintement accompli sa tâche journalière tout au long de sa vie - donc, comme il connaissait bien les choses de la terre, comme il avait sans doute lui-même senti se réveiller ses douleurs quand, le fesoul pointu à la main, le dos courbé vers la terre, il recevait sans broncher les giboulées de Mars et d'Avril; comme il avait éprouvé aussi que, ayant planté l'échalas des semaines durant, alors que n'existait pas le sabot à crochet, ses mains calleuses garnies d'échardes et striées de crevasses saignantes n'étaient guère agiles à tourner les liens d'osier; comme il savait tout cela, il paraît qu'il accordait sans trop se faire prier un délai de huit jours aux retardataires.

 

"Ne croyez-vous pas, bon Saint Verny, qu'il est préférable pour vous de ne plus sortir de votre église Saint Pierre où vous parviennent à peine les bruits et le langage du dehors que vous ne reconnaîtriez plus pour ceux qui vous étaient familiers? Que diriez-vous si l'on vous promenait à nouveau sur les sentiers de votre jeunesse? Arrivant au sommet de votre coteau de la Penderie*, quel coup recevriez-vous au cœur en ne voyant plus votre croix! Lorsque revenu de cette émotion, vous ouvririez les yeux pour inspecter comme autrefois votre apanage:

 

"Ciel, diriez-vous, pas une seule baue! Tout est échalassé alentour; c'est bien, mais, là-bas, que manque-t-il que j'avais coutume de voir? Ah! mes noyers, mes grands arbres, mes vergers fleuris! Et plus loin qu'est-ce donc? On dirait des blés murs! Des blés! À la cime de la côte des Cheix de Chaumontel et de Champblanc**! Et des blés murs en cette saison! Et les vignes alors que sont-elles devenues? C'est impossible: ce doit être quelque nouvelle culture d'invention diabolique! Vite, rentrons, je ne reconnais plus mon horizon". Oui, rentrons, bon Saint Verny, car si quelqu'un vous chuchotait à l'oreille que maintenant on taille aussi bien en Novembre qu'en Mars avec un outil appelé sécateur qui ne ressemble point du tout à votre serpe; que la joie que vous avez ressentie tout à l'heure en ne voyant pas une baue à l'horizon était due non pas à ce que le vigneron  est plus vaillant qu'en votre temps, mais bien à ce qu'il ne déchalasse plus en hiver, et se contente au printemps d'enfoncer un peu plus chaque année l'échalas dans la terre jusqu'à ce qu'il disparaisse presque en entier; que l'on promène à travers les vignes des chevaux traînant quelque infernale machine de fer en jurant et sacrant à chaque échalas brisé; que l'on peint les vignes en vert pendant l'été ***; qu'on les arrache pour ne plus les replanter; que, ce que votre vue devenue basse vous donnait l'illusion d'être du blé mur au mois de Mai, est tout simplement du vigoureux chiendent dont les pousses successives sèchent là depuis des années; que les caves où vous aimiez sans doute à aller boire la tassée chez tel ou tel de vos vieux camarades, sont en partie vides de leurs jolies rangées de pièces sur lesquelles, en passant, vous ne manquiez pas de frapper deux petits coups avec le doigt replié, pour juger de leur état intérieur, comme fait le médecin qui ausculte un malade; que dans quelques années, vous n'aurez plus de raison d'être, car il n'y aura plus ni vignes ni vignerons dans votre cher Beaumont devenu faubourg d'une grande ville industrielle; si l'on vous disait tout cela et bien d'autres choses encore, vous mourriez à nouveau, mais de chagrin cette fois".

    

(*) Terroir le plus élevé de la commune situé à l’extrémité ouest de la rue Nationale. L’origine de ce terme est une appendaria, petite exploitation avec bâtiments, jardin et parcelles de culture (cf G.Fournier « Le peuplement rural en Basse-Auvergne durant le Haut Moyen Âge) .

(**)Terroir situé au sud de la commune, sur les premières pentes de montrognon.

(***) Le sulfatage.

 

photo4processt-verny.jpg

 

 Procession de la Saint Verny. L'une des nombreuses vignettes dessinées par Marcelle Russias pour illustrer le récit de Joseph Pageix. Marcelle Marguerite Jeanne Baptistine Russias naquit à Beaumont en 1902. Elle était la fille de Pierre Russias, épicier à Beaumont et de Marie Fauverteix.

 

Joseph Pageix évoquait aussi, avec la même nostalgie, les banquets de la Saint Verny:

 

"Quand  le gros travail de printemps était terminé, les vignes échalassées, le sol écorché, d'abord au fesoul pointu-que le progrès devait remplacer plus tard par le fesoul à cornes-puis nettoyé pour de bon au fesoul plat, les prés bien abreuvés, toutes les semences en terre nos vieux vignerons avaient l'habitude de fêter leur saint patron, non seulement en une solennité religieuse pieusement célébrée, mais encore en de formidables banquets: les banqquets de la Saint Verny. Au jour convenu, ils se réunissaient par quartiers et dressaient de longues files de tables de fortune en plain air, à même la rue.

 

Certes, ces festins n'avaient rien de commun avec nos cérémonieux dîners modernes: On ne connaissaient point l'étiquette, cette belle invention qui met comme un carcan sur les épaules des gens de laterre, quand d'aventure une circonstance les oblige à aller à quelque cérémonie dans le monde, eux, habitués à se mettre à l'aise dans le travail, et n'ayant jamais su faire des corbettes que le fesoul en mains devant leurs ceps de vigne. L'étiquette, qui veut que vous vous teniez à table les coudes au corps comme à la parade; que vous avaliez votre soupe - non, votre consommé - en évitant soigneusement la bruyante aspiration pourtant si commode que l'on entend à la table du paysan, que vous vous gardiez bien surtout de faire un "chabrot", ce régal du vigneron, qui consiste à arroser largement de bon vin son bouillon. L'étiquette qui vous oblige à parler bas à votre voisin que l'on impose sous prétexte de faire connaissance, et que n'intéressent point les choses de la terre; à sourire entre vos dents, car le rire est défendu; à boire à petites gorgées, sous peine de passer pour un goujat, le vin dont on a parcimonieusement couvert le fond de votre verre, pour laisser sans doute la place à l'eau qu'il est de bon ton d'y ajouter, etc, etc...L'étiquette qui en un mot vous coupe radicalement l'appétit et la gaîté. Ah non! Elle n'avait pas cours au banquet de la Saint Verny! Le verre était plein et large était la rasade, et les langues déliées, et le rire franc, et robuste l'appétit. En guise de cavalière, chaque convive s'approchait de la table en donnant le bras à un énorme bousset; un autre à un panier de vieilles bouteilles semblables en leur robe de bourre à de vénérables douairières en costume de velours. En guise de révérence, c'étaient de solides poignées de mains à faire évanouir de douleur nos pâles mondains d'aujourd'hui, et de formidables tapes d'amitié sur les épaules; et l'on se plaçait à la bonne franquette: on se connaissait tous si bien! Et l'on se comprenait de même. On trinquait à tout propos, et le choc des verres, le claquement des langues indispensable pour bien apprécier le vin, le bruit des fourchettes, celui des conversations et des rires vous faisaient une joyeuse musique traduisant la bonne humeur de tous.

 

Et quand chacun avait vidé pas mal de ces vieux pichets de bois cerclés de cuivre qui marquaient aussi bien que les carafes de cristal; quand de puissantes voix avaient longuement fait trembler les vitres voisines avec de gaillardes chansons, quand tous avaient consciencieusement avalé, en guise de liqueur de marque, un "canard" tiré de quelque vieille bouteille d'eau de vie ayant peut-être vingt ans de grenier - témoins ses nombreuses brisques de toiles d'araignée - alors on songeait à se séparer, le corps bien lesté, prêt pour le rudes coups de collier du lendemain, et l'âme toute ensoleillée par cette soirée de franche amitié"

           

« Si un convive, un peu moins résistant, éprouvait quelque difficulté à se lever de son banc, et après avoir réfléchi un moment sur la direction à prendre, tachait de regagner sa demeure en cherchant quelque peu l’appui des murailles, personne ne songeait à s’en offusquer, pas même le bon Saint Verny qui du haut du ciel devait plutôt considérer d’un œil attendri ce fidèle conservateur des antiques traditions ; pas même le Bon Dieu contre qui on aurait pu invoquer le grief d’avoir créé si bon le vin de Beaumont, et le vigneron si amoureux de sa vigne et de son produit. Du reste, je ne sache pas qu’en aucun des quatre saints Evangiles, il se puisse découvrir le moindre passage dans lequel Notre Seigneur ordonne de « baptiser » le jus de la vigne. On l’y voit changer l’eau claire en vin bel et bon, mais de vin bel et bon en faire de l’eau rougie : jamais ! Ce qui prouve amplement que si tel il l’a créé c’est pour que tel il soit bu ; et c’était bien ainsi que le comprenaient nos aïeux. Le dernier banquet de la Saint Verny eut lieu en 1869. Celui de 1870 dont les préparatifs étaient faits fut empêché par la déclaration de guerre (*)".

 

 

Menu du banquet de la Saint Verny du 10 juin 1906 écrit et illustré par mon grand père Pierre Pageix. 

 

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                            ( Coll. J. Pageix)

Menu du banquet de la Saint-Verny du 10 juin 1906

écrit et illustré par mon grand père Pierre Pageix-Cromarias. 

(*): Je pense que les banquets de la Saint Verny se perpétuèrent, peut-être sous une forme plus modeste. Le menu du 10 juin 1906 dessiné par mon grand père Pierre Pageix (le frère de Joseph et d'Antony) l'atteste.

 

 

La visite de Napoléon III le 29 juin 1862.

 

On ne peut passer ici sous silence les festivités, brèves, mais fastueuses pour une petite ville comme Beaumont, que suscita le passage de Napoléon III, le 29 juin 1862, lors de son voyage en Auvergne. Il se rendait à Gergovie par Romagnat. Les préparatifs furent ordonnés par la mairie, après délibération municipale, pour la construction d'un arc de triomphe orné de pampres et de tonneaux, et une animation avec des danseurs de bourrée.

 

Sa calèche passa sous l'arc de triomphe et le maire, Antoine Faye, avec son adjoint Vignol, lui offrirent du vin dans un tassou en argent, cadeau de la commune de Beaumont.  Celui-ci laissera une somme de 500 francs pour les pauvres. Il y eut de nombreuses relations imprimées de ce voyage impérial (Cormier, Dousse, etc.). Je conserve le récit de cet événement, fait par mon arrière grand mère Bonnette Bardin, épouse de Jean-Baptiste Pageix, alors qu'elle était à l'école des sœurs de Gerzat.

 

 

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L'Empereur, en uniforme, dans sa calèche, reçoit le tassou d'argent

que lui remplit le Maire.

On reconnaîtra à ses côtés son Ministre Rouher, auvergnat comme on le sait, et le Duc de Morny, qui avait des intérêts en Auvergne (sucrerie de Bourdon, etc.)

6-Un peu d'humour en guise de conclusion...Du bandier au garde champêtre

 

Au Moyen Âge et au XVIe siècle, pour les assister dans leurs fonctions, les élus étaient entourés d'agents rémunérés. Celui qui semble avoir tenu un rôle d'homme à tout faire -au moins à leurs yeux- était le bandier, ou gastier. Au moment des vendanges, sa tâche essentielle était de garder les vignes afin d'en éloigner les prédateurs de toutes plumes et ... de tous poils...

 

Ainsi, les élus de 1502, Jacques Mège dit Lhonard et Anthoine de Mezes dit Grasset recrutèrent un tel bandier ou gastier pour surveiller les blés, vignes et arbres fruitier. Le choix se porta sur Jehan Marsent (ou Marsant), dont les gages furent fixés pour l'année à 6 livres tournois.

 

Ce bandier, qui peut être comparé au garde champêtre de nos villages, était désigné comme "le serviteur des élus"; c'est peut-être pour cela que ceux-ci lui octroyaient des gratifications supplémentaires, comme ce fut le cas en 1502 où il reçut vingt sous de plus pour ses services de l'année, car il avait œuvré "pour le bien commun et pour la cause des maulx que l'on fesoit pour la pardicion des blés, vignes et des fruictz". Le bandier veillait aussi au bon déroulement des vendanges et, lorsque les élus estimaient qu'il convenait de renforcer la surveillance des pampres arrivés à maturité, ils allaient recruter d'autres bandiers dans les paroisses voisines. Ainsi, en 1527, alors que les vendanges "acommensarent par pans, le lundi 21 octobre", les élus allèrent chercher les "bandiers de Chamalhere et les trouvarent dans le treulh et cuvaige du Chappitre". Ils leurs demandèrent leurs tarifs, et il s'ensuivit un marchandage quelque peu sordide: 10 livres, 5 livres, puis 50 sous, et enfin 35, qu'ils déclarèrent être leur dernier prix! Finalement, les élus ne voulant pas leur donner plus de 30 sous, chacun se cantonna sur ses positions! Rentrés bredouilles à Beaumont, les élus firent leur rapport aux habitants. Ceux-ci les dépêchèrent aussitôt "devers Romaignihat pour les avoir". Heureusement, pour les élus, les bandiers de Romagnat, qu'ils trouvèrent derrière Montrognon, se firent moins prier et acceptèrent d'être recrutés pour 20 sous seulement!

 

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Les registres des délibérations municipales tenues à l'époque de la Révolution, que j'ai entièrement transcrits, contiennent eux-aussi des passages assez cocasses à propos des gardes champêtres:

 

==>Le 7 mars 1790, le conseil général se réunit à la réquisition du procureur de la commune "qui a dit que plusieurs particuliers de ce lieu lui ont porté des plaintes sur le dommage causé par les troupeaux de mouton tant dans les vergers que dans les vignes, qu'il seroit en conséquence nécessaire qu'il fut interdit aux propriétaires de ne plus les y mener en quelque saison de l'année que ce soit même les bœufs et les vaches dans les vergers clos; et qu'il soit nommé un garde qui soit autorisé à prendre les dits bestiaux trouvés dans les dits vergers et vignes, auquel garde il soit payé un gage.

"Le procureur de la commune (Pierre Goughon, notaire), a aussi requis qu'il soit fait défense à tout particulier de ce lieu de laver dans le bac de la fontaine de la place aucun linge, choux, ni autres choses et d'autoriser un particulier à y veiller.

"Sur quoi le conseil général intimement convaincu de la vérité de l'exposé ci-dessus a unanimement nommé pour veiller à la conservation des héritages, et pour qu'aucun particulier n'y mène des moutons, brebis, chèvres et autres bêtes en aucune saison de l'année, la personne d'Antoine Georget huissier de l'endroit, y habitant, lequel sera tenu d'y veiller soigneusement, de saisir ou dresser procès-verbal des contraventions qui pourront être commises à cet égard.

"Et pour tenir lieu de salaire au dit Georget, il lui sera payé sur les revenus communaux de ce lieu la somme de huit livres par mois à compter du jour qu'il entrera en fonction, indépendamment des amendes qui pourront être prononcées pour raison de prises de bestiaux qu'il fera et qui lui appartiendront.

"Il a été aussi d'une voix unanime décidé que le dit Georget sera suivi et accompagné dans ses tournées ordinaires par deux habitants chaque jour et à cet effet sera remis au dit Georget un tableau contenant les noms et le nombre des particuliers qui devront l'assister et qu'il sera tenu de prévenir la veille du jour que deux de chacun des dits particuliers devront garder".

Antoine Georget, convoqué dans l'instant, a prêté serment, tout en réclamant les salaires qui lui sont dus car il assure ces fonctions depuis déjà six semaines.

Sur le deuxième point évoqué par le procureur, il fut arrêté "qu'aucun particulier ne pourra laver aucune espèce de linge ni herbage dans le bac de la fontaine de ce lieu et pour veiller tant à cela qu'à la propreté de l'eau du dit bac et de l'entour de la fontaine, le corps municipal a nommé la personne de Jean Vergnette voisin de la dite fontaine auquel il sera payé la somme de quinze livres annuellement qui sera également prise sur les deniers communs de ce lieu"

Jean Vergnette, également convoqué, "a déclaré qu'il veilleroit avec la plus grande attention à la propreté du dit bac et à ce qu'aucune femme fille ni autre personne n'y aille laver"!...

==>Ce "dispositif" un peu trop sophistiqué ne semble pas avoir persisté, car le 30 décembre 1792, le conseil général de la commune, sous la présidence du maire Étienne Pageix, se réunit à la requête du procureur Pierre Goughon qui rapporte qu'en l'absence du garde champêtre, "un grand nombre de particuliers mènent indifféremment dans les héritages des uns et des autres des brebis, chèvres et vaches dans les prés vergers et dans les vignes; que les animaux y causent un dégât irréparable, en broutant l'écorce des jeunes arbres et en cassant les échalas et font un tort considérable. Ces abus encore tolérés deviendroient d'autant plus abusifs qu'il seroit difficile de les contenir et d'arrêter leur progrès".

Le citoyen Truchaud, citoyen habitant de la ville de Clermont, se présentant pour remplir les fonctions de garde "fonctions qu'il a rempli sans reproches", le conseil l'a nommé garde messier avec appointements annuel de 220 livres. De plus, "il sera logé dans une petite chambre à plein pied de la cour de la cy devant abbaye à droite en entrant". Le montant des amendes encourues fut ensuite fixé par un arrêté de police: 20 sous pour tout particulier qui aura fait paître ses animaux dans les prés vergers terres semées et vignes; pour toute bête trouvée et saisie dans tout autre héritage que celui des propriétaire des bêtes, pour les vaches 10 sous par tête, pour les chèvres 20 sous, et pour les brebis et moutons 5 sous aussi par tête et le double en cas de récidive, le tout indépendamment des dédommagements dus aux propriétaires.

Ainsi, on pourrait penser que de nombreux beaumontois, dans l'enthousiasme des libertés nouvelles apportées par la Révolution, se crurent autorisés à commettre de tels actes d'incivisme...

 

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Au XIXe siècle, la commune embaucha un garde champêtre (11). La loi ne pesait pas toujours uniquement sur nos vignerons, si l'on en juge par cette situation pour le moins cocasse où le garde-champêtre de Beaumont fut lui-même pris en défaut: c'était bien sûr pour une toute autre raison, bien expliquée dans le compte rendu de la séance du conseil municipal du 31 mars 1871 où il est indiqué qu' «à la suite des vendanges (donc celles de 1870), le garde-champêtre a fait une quête de vin à son profit. Cette manœuvre constitue un abus immoral entravant la liberté de ses fonctions». Du coup, que fit-on pour prévenir de futurs abus? On augmenta son traitement "qui passa de 450 à 550 francs, payables le 31 décembre de chaque année"! On peut comprendre la clémence du conseil municipal, car la faute était somme-toute assez vénielle et l'on remarquera que la date coïncidait à quelque chose près avec la fin de cette malheureuse guerre franco-prussienne...

 

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Vignerons de Chamalières au début du XIXe siècle.

Noter la berte, le fessou, le bousset ou barlet et le chapeau...

(lithographie de Bour pub. Par Talbot à Clermont-Fd. coll. Pers.)

 

On ne peut clore cette évocation du vignoble beaumontois, qui constitua durant des siècles la source de revenu principale de nos ancêtres vignerons, sans dire un mot du phylloxéra. Ce maudit parasite, en provenance des États-Unis, débarqua en France vers 1870 et ne fut bien présent en Auvergne qu'à partir de 1890. Pour le combattre, après arrachage des ceps atteints, il fallu les remplacer par des plans...américains, sur lesquels on greffa des cepages résistants.

On créa un comité départemental du Puy-de-Dôme d'Études de Vigilance contre le Phylloxéra qui organisa dans les communes viticoles des écoles de greffage, et un diplôme de greffeur était délivré à l'issue d'un examen.

Voici le diplôme de greffeur décerné le 3 avril 1892 à Alexandre Bouchet (le futur général de division aérienne...), cousin de mon grand père Pierre Pageix, par le "Comité départemental du Puy-de-Dôme d'Étude de Vigilance contre le Phylloxéra". Le Directeur de l'école était Bertrandon et le Maire Bayeron.

 

 

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Photo du document communiquée par son petit fils le colonel Antoine Bouchet.

 

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Mon grand oncle, Joseph Pageix, évoquait dans son ouvrage déjà cité la préparation des vendanges, qui commençait avec les bouviers de la montagne, qui venaient avec leurs attelages pour transporter la vendange. Chacun d'eux avait à Beaumont son vigneron attitré, son "maître" ou "chalonge", à qui il offrait chaque année ses services.

On appréciera au passage la verve et l'humour de Joseph Pageix, qui décrivait ainsi la rencontre entre l'un de ces voituriers et son employeur:

 

"Ils prolongeaient volontiers cette petite station chez chacun de leurs chalonges, car, tout le monde sait bien qu'autrefois le vin était de luxe à la montagne, la boisson habituelle étant le « petit lait ». Il ne leur déplaisait pas de venir ainsi de temps en temps se rougir un peu la conscience avec le contenu d'un pichet cerclé de cuivre, qui ne faisait que gravir et descendre les degrés de la cave en leur honneur. « Buva nin, nin büri beïo pas demô » (buvez-en, vous n'en boirez peut être pas demain), disait le chalonge en versant à ras bords.

"Eux, en riant, se laissait faire. Ils détournaient à demi la tête quand leur hôte saisissait le pichet, et tout à coup, - quand le verre était plein, - levant la main, ils faisaient mine de protester : « Tche tche tche ! Certas frère ! Rassas ! Veze be que voüli me fère fiurlà ; ène ô lô voutrô » (Certes, frère, assez ! Vous voyez que vous me faite soûler ; à la vôtre), disaient-ils d'un air résigné.

"Ils buvaient sec, tant et si bien que certains, le soir venu, songeant malgré tout à regagner leur village, mais voyant trente-six têtes à leur cheval, étaient incapables de trouver la bonne pour lui passer la bride, et s'obstinaient à présenter le mors aux barreaux du râtelier. Les bras levés, se pointant sur leurs sabots, balançant, soufflant, ils se fatiguaient vite à cette fausse manœuvre, et, de guerre lasse, se laissant doucement couler sur la paille de l'étable, ronflant bientôt à poings fermés, ils s'en remettaient à cette sagesse de la Providence pour la question de leur retour".

 

Plus loin, il évoque "la loue": ainsi désignait-on l'embauche de la main d'œuvre nécessaire aux vendanges. Bien avant jour, les vignerons se rassemblaient sur la place du village où se pressaient déjà tous les bouviers venus de la montagne pour se louer:

 

"Dès trois heures du matin, l'Angélus, suivi de la sonnerie de la grosse cloche à toute volée, se chargeait de réveiller les dormeurs les plus endurcis en annonçant la « loue ». C'est à ce signal que se rassemblait sur la place de l'église une foule de montagnards venus de tous les coins du département, et même des départements voisins. Ils étaient partis, la veille ou l'avant-veille, à pied, par bandes joyeuses, vidant les hameaux, n'y laissant que le personnel indispensable aux soins du bétail.

"Leurs sabots ferraillant sur les cailloux du chemin, marquaient la cadence des chansons qui les entraînaient dans leur marche, leur faisant oublier la distance et la fatigue. Ils portaient dans le panier un léger bagage, tout juste de quoi se changer quand ils rentreraient trempés par la pluie. Et ce qui les attirait ainsi dans le pays vignoble, c'était moins l'appât des quelques pièces d'argent qu'ils serreraient au retour dans le « bas de laine » que la gourmandise du raisin, eux privés de fruits en toute saison.

"Beaucoup avaient, comme les bouviers, leurs maisons attitrées et retrouvaient dans un coin de la « fenière » leur lit de l'année précédente.

"Quelques maisons hospitalières ouvraient aux autres les portes de leurs granges. Mais un grand nombre – les hommes surtout – n'attendaient pas, pour se rendre sur la place, que sonnât l'Angelus. Ils étaient là, dans le noir de la nuit, serrés contre les murs à l'abri du vent, formant des petits groupes où se discutaient les prix qu'ils allaient demander, s'interrompant parfois pour « battre une semelle » endiablée afin de vaincre le froid qui les engourdissait. Quand la place commençait à se peupler et que paraissait un vigneron muni de sa lanterne, il était aussitôt entouré.

"S'adressant à la première personne qu'éclairait son rayon de lumière:

- « Combe voulez-vous gagna drolô ? » (Combien voulez-vous gagner, drole?);

- « Trentô sus, mas seis pas tôt surlô, seins quatre do mémô violadze...Che voulez nous pregne tutas nus arrandzôrins beyo be ! » (Trente sous, mais je ne suis pas tout seul, nous sommes quatre du même village...Si vous voulez nous prendre tous, nous nous arrangerons bien);

"Lui, tout en discutant, promenait sans façon son falot sous le nez de chacune afin de juger de leur mine.

- « Seis be in pô veillô vous ! »(Vous ne seriez pas un peu vieille, vous?);

- « Et vous, seis pas vieux grand chimple ! » (Et vous, n'êtes vous pas un vieux grand simple?);

- « Sabez vindegna au moins ? » (Savez-vous vendanger au moins?);

- « Pregna me ô l'issayô, zu virez be. » (Prenez-moi à l'essai, vous verrez bien);

- « Té ! Tï nin nô dzunô que me convèndiôt be ! (Tiens, voilà une jeune qui me conviendrait bien);

- « Eh be, pregna me, ma seis môridadô, faut pregne me n'homme pô pourta l'hotô. » (Eh bien, prenez-moi, je suis mariée, il faut prendre mon homme pour porter la hotte);

- « Certas ! - disait l'homme en question, - ma que me bouéyez bure de bounnô tizanô, foré be voutrô bezugnô. » (Certes, pourvu que vous donniez à boire du bon vin, je ferai bien votre besogne);

- « Seis be in pau n'haut pô vuida lus pôners ! » (Vous êtes bien un peu grand pour vider les paniers);

- « Ma, me côtôrai be in peti pau. » (Mais je me baisserai bien un petit peu);

- « Eh ne ! Bouèye viengt'ô chinq sus mi las fennas et trentô sus mi le bôrtère, che cou vous convait segua me. » (Et je donne vingt-cinq sous aux femmes et trente aux bertiers, si cela vous convient suivez-moi);

- « Eh be ! Coui n'ôffouère tssobôdô. » (Eh bien, c'est une affaire finie);

"Et ils suivaient la lanterne jusqu'à la maison où, par précaution, ouvrant la porte du cuvage, le maître leur disait, sans paraître le moins du monde y attacher de l'importance, - mais il avait son idée - : « Eh be ! In pitant lô soupô posa tï voutri pôners » (En attendant la soupe, posez là vos paniers) , et il donnait un tour de clef. Car, il lui était arrivé plus d'une fois de se trouver bien attrapé pour avoir négligé cette simple mesure de prudence. Certains, en effet, que n'embarassaient pas précisément les scrupules, à qui l'on n'avait pas eu l'idée de faire laisser là leur bagage, se dépêchaient de retourner sur la place offrir à nouveau leurs services, et n'hésitaient pas à planter là leur premier maître pour suivre celui qui leur offrait seulement deux sous de plus.

"Et allez donc les reconnaître, quand vous avez à peine vu le bout de leur nez sous le rayon fumeux d'une lanterne !

 

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7-Notes

 

(1) : Dîmes : à Beaumont, la grange des dîmes était située à l'extrémité Est de la rue du 11 novembre (ancienne rue des Granges) . Toutefois, les vendanges faites sur les territoires relevant directement de l'abbaye devait être convoyées vers les vastes cuvages du monastère (la réserve seigneuriale, pour ce qui concerne les vignes, était située sur les terroirs de Chamblanc, etc figurant sur le plan ).

 

(2): Fonds de l'abbaye de Beaumont, 50H3, registre de justice de 1499 à 1510, F°5v° et 6 r°.  

 

(3) : Extrait de "Une communauté urbaine au XVIe siècle, Beaumont-lès-Clermont-Droits seigneuriaux et libertés municipales", Jacques Pageix, 1992.

 

(4): Registres des délibérations municipales, Mairie de Beaumont.

 

(5) : «Beaumont », par Joseph Pageix, paru à partir de 1925 dans le bulletin paroissial et relié par ses soins en un ouvrage de 75 pages. J'ai entrepris sa réédition en y ajoutant un chapitre resté manuscrit (consacré à la culture et au traitement du chanvre) en l'illustrant de ses propres photos et des croquis de Marcelle Russias. Beaucoup de chapitres sont consacrés à la vigne et aux activités qui lui étaient liées (la loue, les vendanges, la vinification, le vin de paille, le marc, etc.)

 

(6) : Fonds de l'abbaye de Beaumont, registre d’enquête de 1494, 50H38.

 

(7) : Voir les transactions entre le seigneur d'Aubière et les habitants.Pierre-F. Fournier et Antoine Vergnette. Les droits seigneuriaux à Aubière in Revue d'Auvergne Tome 42-N°1, 1928.

 

(8):Fonds de l'abbaye de Beaumont, 50H1 et 2, registre de justice de 1383 à 1474.

 

(9): Voir: "Saint Verny patron des vignerons en Auvergne" par Pierre-François Aleil, in Mémoires de l'Académie de Clermont-Fd, tome XLVIII, 1982, et "Le culte de Sant-Verny en Auvergne" par Gwenaëlle Gayet, 2008.

 

(10): Les baues: J'ignore l'origine étymologique de ce terme; toutefois, sa signification est claire: on la trouve dans l'ouvrage intitulé "Sur la viticulture et la vinification du département du Puy-de-Dôme. Rapport à son excellence M. Rouher, ministre de l'agriculture du commerce et des travaux publics", par le docteur Jules Guyot (in 8 broché de 88 pages A, à Paris, à l'imprimerie Impériale, 1863).

 

Extrait de la page 42: "Dans les grands vignobles du Puy-de-Dôme, on emploie, par hectare, au moins 20 000 échalas de 2m à 2 m, 35 de longueur, en saule, peuplier et sapin. Ces échalas coûtent de 30 à 50 francs le mille, en moyenne 40 francs; ce qui constitue une avance de 800 francs et un entretien  d'au moins 1/8, c'est à dire de 100 francs par an et par hectare. L'arrachage annuel des échalas et leur mise en meule, le renouvellement de leur pointe chaque année, leur mise en place à chaque printemps et leur assemblage par un lien d'osier à leur sommet, constituent des dépenses et un emploi du temps considérables".

 

(11) : Au début des années 50, la commune de Beaumont disposait encore d'un garde champêtre qui exerçait aussi les fonctions de crieur public. Je me souviens de ce grand type à moustaches coiffé d'un képi aux armes de la ville: ses "avisse à la population!" étaient ponctués par de formidables roulements de tambour !

 

8 Quelques vieilles photos:

Paysages et objets...

 

8-1 Les vignes des Rivaux.

 

On aperçoit une tonne et un cheval près de sa charette. On distingue les Côtes de Clermont en arrière-plan à gauche de la photo.

 

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Tirage papier et montage photographique de Joseph Pageix (vers 1895).On appréciera le charme bucolique de cette photo prise probablement en été; on y respire le calme et la sérénité. Admirons ces rangés de ceps parfaitement alignés, avec ici et là quelques arbres fruitiers (pêcher, cerisiers, amandiers, etc)

 

8-2 Panorama des Liondards.

 

 

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Le chemin de fer serpente entre les vignes qui couvrent toute la pente jusqu'aux portes de Clermont. Au premier plan: des vignes appartenant à mon arrière grand père Jean-Baptiste Pageix-Bardin.

 

Ces quatre photos sont des tirages sur papier réalisés par contact direct des négatifs (plaques de verre) des photos prises vers 1900 par mon grand oncle Joseph Pageix. On reconnaît d'ouest en est : Montaudou, le Puy de Dôme, les Côtes de Clermont. On aperçoit un groupe d'ouvriers maçons affairés à la construction d'une première maison...qui en annonce bien d'autres.

 

8-3 Photos Joseph Pageix

 

photo12vendanges

 

Un bel alignement de bacholles...Les vendanges d'Antony Pageix-Gay (vers 1920).

 

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Préparation des greffons en 1901.

A gauche, en cravate, mon grand père Pierre Pageix-Cromarias.

Au fond à droite : son père Jean-Baptiste Pageix-Bardin.

 

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Les mêmes personnages...

 

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Après les vendanges, on distillait le marc de raisin. Voici l'alambic qui se trouvait dans la descente du cuvage de la Place d'Armes, chez mon arrière grand père Jean-Baptiste Pageix Bardin. Il aurait été réquisitionné pour l'utilisation du cuivre propre à la fabrication des douilles lors de la guerre de 1914-1918. La qualité de bouilleur de cru s'éteignit avec mon grand père.

 

9-Quelques vieux objets:

 

 

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9-1 Ces vieux outils et autres ustensiles viticoles sont pieusement conservés: Un pot en bois de châtaignier cerclé (un pot équivalait à 15 litres). Coll. Jacques Pageix.

 

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Sur cette vieille photo (prise vers 1899 à la Place d'Armes par Joseph Pageix),

Antony Pageix, alors au service militaire, converse avec le docteur Bataille.

On peut voir le même type de pichet d'un litre, en bois cerclé en cuivre.

 

 

9-2 Deux serpes:

 

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 "Blanchard à Boisséjour" (serpe à talon)         

 

 

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... "Toutel à Issoire".

 

 

 

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9-3 et 4 Le tassou du pauvre et...

 

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                                                       le tassou du riche...                                                                         

                                           Coll. J.Pageix

 

A vrai dire, ces deux taste-vin appartenaient l'un à mon arrière grand père Jean-Baptiste (P B = Pageix-Bardin, 1898) et l'autre à mon grand père Pierre Pageix-Cromarias. Pour les vignerons politiquement un peu à droite, le fond de leur tassou était fait d'un écu d'argent de 6 livres (ici à l'effigie de Louis XVI), alors que pour ceux qui étaient un peu à gauche, le fond était une pièce de 5 franc à l'emblème républicain...C'est du moins ce que me racontait mon grand père...

 

9-5 Une épiarle (en buis): ce petit robinet primitif était enfoncé dans le flanc du tonneau pour goûter le vin sans avoir à placer un robinet.

 

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Coll.J.Pageix

 

9-6 et 7 Un bousset (monoxyle) très ancien et un bousset plus récent:

 

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(Coll. J. Pageix)

 

9-8 Un fer à marquer les tonneaux, portant les initiales I . P (Iacques Pageix) inscrites dans un cœur, datant probablement du XVIIe siècle. On rapprochera ces initiales dans ce cœur de la figure gravée dans le manteau en bois d'une cheminée de l'ancienne mairie de Beaumont, rue Barnier...Je pense qu'un manche en bois (qui a disparu) devait isoler de la chaleur!

 

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9-9 et 9-10 Une tarière pour percer les bondes et un outil pour enfoncer les cercles des tonneaux:

 

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Coll. J. Pageix

 

9-11 On retrouve le dessin d'une serpe à talon tranchant sur une pierre tombale située à l'entrée de l'église de Notre-Dame de la Rivière. Il s'agit de celle des Védry, famille de viticulteurs beaumontois.

 

 tombeauvedry

 

 

 

Védry

 

 

Voici une photo prise en 1972 et un relevé fait par mes soins à la même époque. 

 

 

Cet acte de décès relevé dans les registres d'état-civil de Beaumont montre que cette pierre tombale se trouvait initialement dans l'église (comme c'est le cas à Chamalières où l'on en trouve quelques unes dans la nef de l'église) et non à l'extérieur où elle fut placée plus tard.

 

DecesAntoineVedry1745.PNG

 

"L'an mil sept cents quarante cinq le cinq du mois de décembre Antoine vedry vigneron habitant de ce lieu agé de cinquante huit ans muni des sacrements de penitence  decedé le jour précedent a été inhumé dans l'église de notre Dame et dans le Tombeau de ses predecesseurs en présence de fiacre vedry et Paul Bayeron vignerons habitans de ce lieu qui ont declaré ne scavoir signer de ce enquis Artaud curé"

 

 

Jacques Pageix mai 2012 

 

Ci-dessous: "Le travail dans la cave", eau-forte de 1790 de Jean-Jacques de Boissieu (1736-1810). Coll.pers.

 

Les vendanges à Beaumont
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