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10 novembre 2014 1 10 /11 /novembre /2014 12:10

...Suite des lettres de Pierre Pageix  

 

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Probablement, Pierre adressa d'autres lettres à ses parents au fil des étapes suivantes, qui devaient être couvertes en 8 jours... Son service se poursuivit encore jusqu'en 1899, avec des marches, des exercices et des cantonnements; les 5 lettres suivantes concernent les écoles à feu auxquelles il participa sur le polygône de Bourges, qui était à la fois une manufacture importante de munitions et un champ de tir pour l'artillerie.

 

On remarquera qu'il avait déjà connu les écoles à feu lors d'un précédent cantonnement à Bourges en 1898: il le rappelle en effet dans les lettres qui suivent, où il relate sa dernière écoles à feu, accomplie avant de passer la main comme on va le voir à son frère Antony, qui s'engagera à son tour pour permettre à Pierre de rentrer dans ses foyers. Ces lettres contiennent de précieux conseils donnés à son frère pour l'éclairer sur les rites à respecter lors de son affectation au corps (pot d'arrivée, petits égards pour la hiérarchie subalterne, etc.)

 

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2-Lettres du service militaire

Édouard Detaille: la revue de détail dans la chambrée. 

 

Lettre 20:

 

St Pierre le Moutier le 18 Mai 99

11 heures matin jour de repos.

Chers parents

Je vais vous dire en gros ce que à Bourges je vous expliquerai plus longuement.

Ce n'est pas le temps qui me manque seulement la flemme nous tient si fortement que nous nous sentons davantage de dispositions pour le lit que pour la littérature.

D'abord la santé va comme toujours et j'espère que la vôtre est de même.

1e jour. Partis de Clermont à 4 h. Nous arrivons à Aigueperse à 11h 1/2, assez fatigués. Nous sommes logés chez des cultivateurs pas très riches, mais bons. En somme 1ère étape passable.

2e jour. Partis d'Aigueperse à 4h. Juste au moment où il commençait à pleuvoir nous arrivons à St Pourçain à 11h. moins 1/4 toujours avec la pluie sur le dos, soit 35 Kilomètres mouillés jusqu'à la peau. Pas un fil de sec.

Le long du chemin je disais à Piot "si en arrivant nous pouvions être logés chez un Boulanger, nous pourrions nous mettre dans le four". Ce n'était pas un boulanger qui nous attendait en arrivant, mais bien un patissier et un bon; au bout d'une heure nous n'avions plus un fil de mouillé, et de plus nous avions un bon dîner dans la bidonne. Ce jour là c'est nous qui avons eu le plus de chance du régiment.

3e jour. Nous avons été cités à l'ordre du jour par le Lnt-Colonel. L'ordre était ainsi fait: "Vue la tenue irréprochable de la musique qui malgré le mauvais temps qu'il a fait tout au long de la route a empêché par ses chansons et ses flûtes toutes la colonne à pied de rester en route, nous, Lnt Colonel du régiment autorisons les musiciens à aller demain de St-Pourçain à Moulins en chemin de fer". Pensez si nous étions contents.

À Moulins nous avons été logés dans le même hôtel que l'année dernière, ils nous ont reconnus, et nous ont très bien reçus.

4e jour. Partis de Moulins à 4h. Nous arrivons à St- Pierre le Moutier à 10h.1/2; 33 Km en 6h.1/2 c'est pas mal marché!

Nous sommes logés chez un quinquailler très riche qui nous reçoit bien, il nous fait déjeuner en arrivant et nous invite en même temps à souper pour le soir et le lendemain.

Au souper du 1er soir nous avons débouché (et bu bien entendu) à nous quatre (lui et sa femme) 3 petites bouteilles de bordeaux et une de vieux maconnais et une de bourgogne qui datait de 74.

5e jour. Je ne sais ce qu'il nous payera ce soir, mais tout porte à croire qu'il en fera autant.

Demain 6e jour, nous irons à Sancoins je souhaite y être aussi bien reçu qu'ici. Ainsi soit-il.

Chers parents il n'est que 11h. Mais j'entends mon lit qui m'appelle. Vous pardonnerez donc au pauvre voyageur qui a besoin de repos.

Écrivez moi demain et expliquez moi bien compréhensiblement votre visite au Commandant Mozat (*).

Vous direz bonjours à Mr et Mme Frémey et vous leur direz qu'il n'y a pas plus de champignons dans l'Allier et la Nièvre qu'en Auvergne.

Je charge Antony de dire bonjour à mes camarades.

En attendant votre réponse je vous embrasse de tout mon cœur.

Votre fils.

Pierre Pageix

Musicien au 16e d'Artillerie

au Polygone de Bourges

Cher.

 

(*): François Mozat, né à Beaumont en 1855, fils de vignerons, entre à l'école Polytechnique en 1873 (18 ans!), puis à l'École d'application de l'artillerie et du Génie à Fontainebleau en 1875. En 1897, de retour en métropole après des séjours en Tunisie et en Algérie, il est promu chef d'escadron (commandant) et affecté à l'École centrale de pyrotechnie  à Bourges. Il s'y trouvait donc au moment où mon arrière grand père Jean-Baptiste Pageix conseilla à son fils Pierre de le rencontrer. Promu général de brigade en mars 1914, il est mis en retraite sur sa demande en 1916 et s'éteint à Paris en 1928

 

Lettre 21:

 

Bourges le 26 Mai 99

Chers parents,

J'ai reçu votre seconde lettre hier mais il m'a été impossible de vous répondre de suite à cause du mauvais temps. Il a plu toute la journée.

Vous me demandez dans quel régiment Antony doit s'engager. Eh bien pour moi je pense que le 36e est préférable, surtout au point de vue de l'avancement.

Au 16e tous les sous-officiers sont rengagés au lieu qu'au 36e il y en a très peu ce qui fait qu'après chaque départ de classe il y a beaucoup plus de places de libres.

Ne tardez pas trop à parler à Patard car il pourra vous donner un tas d'explications que moi je ne puis vous donner.

Parlez lui aussi de moi; expliquez lui que les pièces d'Antony étant prètes en peu de temps je pourrais revenir de Bourges en chemin de fer ce qui m'éviterait beaucoup de fatigues.

Pour la batterie où Antony doit s'engager c'est insignifiant qu'il s'engage dans une des 9 premières, mais qu'il se garde bien d'aller dans la 10e ou 11e car ce sont les plus dures.

Tenez moi au courant de toutes ces choses là dans vos lettres.

Laissez moi maintenant terminer l'histoire de mon voyage.

Le 2e jour à St Pierre nous avons été aussi bien que le 1er. Le lendemain partis à 5h. Nous sommes arrivés à 9h à Sancoins, frais et dispos à cause de la courte étape qu'il y a. Là nous avons été logés chez une sourde qui ne nous a pas mal soignés mais à qui nous n'avons pu faire rien entendre.

Le lendemain à Dun sur Auron nous étions chez un ouvrier il nous a donné un lit mais rien plus.

Enfin nous voilà à Bourges un jour de Pentecôte, accompli 30 Km. Le matin montage des tentes en arrivant, confectionnement des lits, enfin en un mot travail toute la journée.

Lundi et mardi il a fait beau mais hier et aujourd'hui le temps semble commencer comme l'année dernière, c'est à dire de l'eau et de l'eau et encore de l'eau.

Enfin on ne s'en porte pas plus mal.

Je crois que c'est à peu près tout ce que j'avais à vous dire pour le moment.

Au revoir chers parents.

Bonjour de ma part à Mr et Mme Fremey ainsi qu'à mes camarades.

Votre fils qui vous embrasse. P. Pageix.

2-Lettres du service militaire

Image tirée des cahiers d'enseignement illustrés.

 

Lettre 22:

 

Bourges le 1er Juin 1899.

Chers parents.

J'ai reçu votre lettre hier et comme vous me le dites il vaut mieux qu'Antony s'engage un peu plus tard de manière à ne pas aller aux écoles à feux. Le voyage qu'il s'évite est bien plus long et bien plus pénible que celui qui me reste à faire.

Je ne sais le temps qu'il fait à Beaumont mais à Bourges il est splendide; j'espère qu'il continuera.

Dans votre prochaine lettre donnez moi des nouvelles des récoltes vous ne m'en avez pas encore parlé.

Voilà déja 10 jours de passés, il n'en reste plus que 15 avant de nous mettre en route; le temps semble passer plus vite que l'année dernière.

J'ai monté un lit suspendu avec du fil de fer et quatre piquets, j'ai bien eu de la peine à le confectionner car, comme outil, je n'avais qu'un petit marteau et mes doigts servaient de tenailles.

Faust est toujours avec nous mais la marche l'a un peu maigri et il a beaucoup fatigué en route. À St Pierre il était si malade que nous avons été obligés de lui faire prendre le train avec un musicien qui avait le pied blessé. Son voyage nous a coûté 18 sous. Enfin pour le moment il se porte bien, il est sur mon lit en train de me passer ses puces.

Les jours se ressemblent tellement que je ne vois rien à vous dire qui puisse vous intéresser. J'espère qu'il n'en sera pas de même de vous et que dans votre prochaine lettre vous trouverez beaucoup de choses à m'écrire.

Bonjour à Mr et Mme Fremey.

(S'il ne tombe pas plus d'eau à Berzet qu'à Bourges les mousserons ne doivent pas être bien épais).

Bonjour aussi à mes camarades, surtout au Caporal Cohendy qui a du reprendre son service depuis déjà quelques jours.

Au revoir chers parents,

Votre fils qui vous embrasse.

Pierre Pageix musicien au 16e d'Artillerie

au polygone de Bourges.

 

Lettre 23:

 

Bourges le 12 Juin 1899.

Chers parents

J'ai un peu tardé à vous écrire parce que je ne savais pas encore par quel chemin nous reviendrions et même en ce moment je n'en suis pas bien sûr; mais il est probable que nous passerons par Châteauneuf. S'il y avait contre ordre je saurai vous le dire. C'est vendredi matin que nous partons, donc si vous aviez à m'écrire il faudrait m'adresser la lettre en chemin. Dans votre dernière lettre vous me parliez d'aller voir le Commandant Mozat. Seulement vous avez oublié la principale chose c'est de me dire son adresse. Je ne sais s'il est au 1er ou au 37e d'artillerie ou à la première Compagnie d'artificiers ou à l'école de pyrotechnie. Le 37e et le 1er sont partis depuis 10 jours pour les écoles à feux et j'ai demandé déjà à plusieurs s'ils ne le connaissaient pas, tous m'ont répondu non. S'il m'était facile d'entrer à l'école de Pyrotechnie, où je pense qu'il est j'irais, mais il faut une autorisation spéciale et ce n'est pas moi qui peux l'avoir. Je demanderai encore aujourd'hui et demain aux quelques soldats étrangers qui viennent au camp et si j'arrive à savoir où il est sûrement j'irai le voir.

Au sujet de l'engagement d'Antony je le répète encore, qu'il ne s'engage ni dans la 10e ni dans la 11e batterie, ce serait trop dur pour lui. De plus quand il s'engagera qu'il soit bien sûr de ne pas aller aux écoles à feux. Dix jours avant je pense que ce ne sera pas trop tôt, car quand les autres partirons c'est à peine s'il aura commencé son instruction.

Voila enfin mes dernières écoles à feux presque terminées et je vous assure que ce n'est pas trop tôt. Cette année je ne suis allé à Bourges qu'une seule fois et j'en ai mangé mon saoul quand même.

Le camp était consigné tous les jours c'est à dire que jamais on ne pouvait sortir sans autorisation. Pendant 25 jours nous avions été fermés comme au quartier nous ne sommes jamais allés à plus d'un Kilomètre de nos tentes.

Malgré cela je trouve que le temps a plus vite passé que l'année dernière, peu à peu on s'y fait.

Joseph m'a écrit il y a déja quelques temps et je lui ai fait réponse. Dans ma lettre je lui parlais d'un jeune moineau que nous avions élevé et qui ne nous quittait plus. Quand vous irez le voir, vous lui direz que tout à l'heure il mange tout seul et qu'il nous suit partout. Quand on l'appelle par son nom il répond très bien.

Nous pensons à moins d'accidents, l'emmener avec nous; chacun le prendra à son tour sur son képi.

Je termine ma lettre , car il est 4 heures c'est à dire l'heure de la soupe, et je vais y aller boire un verre de vin à votre santé à tous, et à celle de Mr et Mme Fremey.

Au revoir chers parents,

Votre fils qui vous embrasse                                    Pierre Pageix

 

Lettre 24:

 

Bourges le 14 Juin 1899.

Chers parents,

Je viens de recevoir votre lettre et je m'empresse d'y répondre.

D'abord laissez moi parler à Antony. Une fois que tu seras à ta batterie tu n'auras qu'à attendre les ordres qu'on te donnera soit pour te faire habiller soit pour ta chambre.

Celui qui t'habillera c'est le garde magasin de la batterie, c'est un simple soldat ou tout au moins soldat de première classe. Je t'engage à l'emmener à la cantine plusieurs petites fois car il ne faudra pas être mal avec lui si tu veux être bien habillé et de plus comme il ne va jamais aux écoles à feux tu seras avec lui tout le temps que le régiment sera absent.

Il ne faut pas être poli outre mesure avec le chef et les maréchaux des logis. Quand ils te parleront réponds leur simplement en n'oubliant pas d'ajouter leur grade à ta réponse tu dis "oui chef, ou oui maréchal des logis ou oui brigadier".

Pour payer la bienvenue à ta chambre, le 2e soir ou le 3e si tu n'as pas le temps avant tu prendras avec toi un ancien, de préférence celui qui t'aura montré à faire ton lit et tu lui demanderas s'il veut venir avec toi à la cantine pour acheter une cruche de vin c'est à dire environ 5 ou 6 litres un gâteau d'un sou pour chaque homme, et une bouteille d'eau de vie c'était bien suffisant.

J'ai payé ma bienvenue le soir après l'appel de 9h., mais je m'étais muni de tout avant. Pour faire la distribution tu en chargeras celui qui sera venu avec toi. Sauf que tu serviras toi-même le ou les brigadiers qui seront dans ta chambre.

La première fois que tu verras le chef tu lui diras que tu as un frère sous les drapeaux et qu'en t'engageant tu le fais revenir. Il est bon de l'avertir, car c'est probablement lui qui s'occupera du certificat de présence au corps.

Je ne vois pas autre chose de bien important à te dire pour le moment, attendu que je te verrai le 2e jour que tu y seras.

Nous arrivons à Clermont vendredi 23 Juin, environ à 1h. Ou midi: trouvez vous-y l'un ou l'autre afin de me dire si Antony est engagé et dans quelle batterie il est pour que j'aille le voir le soir même.

Nous passerons pas à Châteauneuf; j'en suis très content car la route est plus agréable.

Bonjour à Mr et Mme Fremey ainsi qu'à mes Camarades.

Au revoir chers parents

Votre fils qui vous embrasse        Pierre Pageix

2-Lettres du service militaire

Nos jeunes recrues ont fière allure...Photo prise vers 1899 devant l'entrée de la Place d'Armes. On reconnaît mon grand père Pierre Pageix avec la lyre cousue sur sa manche et à sa gauche, son camarade Jean-Baptiste Émuy et son cousin Alexandre Bouchet, le futur Général d'Aviation pour l'instant incorporé dans les Dragons et bientôt Écuyer du Cadre Noir.

2-Lettres du service militaire

Après quelques verres de l'amitié, la pose est bien moins solennelle!  Admirez le petit pichet en bois cerclé d'un litre!  (Je n'ai malheureusement hérité que du pot de 15 litres).

 

Ici se termine la correspondance de Pierre qui rentra dans ses foyers, tandis que son frère Antony prenait à son tour du service, non pas au 16e, mais au 36e Régiment, comme le lui avait conseillé Pierre. Comme on va le voir, Antony entrera tout de suite dans le vif du sujet en accomplissant une longue marche qui partait de Clermont.

Pierre dut faire deux autres périodes d'exercice, du 2 au 29 mars 1903 et du 12 février au 11 mars 1906.

 

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4-Les lettres d'Antony Pageix (1881-1928):

 

Antony Pageix (Antonin Bonnet), né le 6 Juin 1881 à Beaumont, était de la classe 1898. Il avait tiré le N° 23 et s'était engagé volontaire pour 4 ans le 26 juin 1899 à la mairie de Clermont-Ferrand pour le 36e Régiment d'Artillerie. Arrivé au corps le jour même et nommé 2e cannonier conducteur, il porta le numéro matricule de recrutement 946. Sa fiche-matricule précise qu'il est étudiant. Comme l'avait prédit son frère Pierre, il eut de l'avancement en grade: Brigadier le 16 mai 1900, puis brigadier-fourrier le 30 avril 1901 et maréchal des logis le 23 septembre 1901. Son service se termina le 26 juin 1903 avec un certificat de bonne conduite.

Mobilisé le 3 août 1914 et nommé adjudant le 14 avril 1917, il fut affecté au 4e régiment d'artillerie, plus précisémment à l'Échelon Mobile de Réparation (EMDR) sur lequel je reviendrai plus loin, à propos de la Grande Guerre, en notant pour l'instant qu'il fit la guerre en même temps que son frère Pierre et dans la même unité!   

La transcription des lettres d' Antony n'est  pas simple: la plupart d'entre-elles ne sont pas datées. On peut cependant les classer en deux parties: la première (lettres 1 à 6) concerne une marche à l'été de 1899 pour gagner le camp de Chamborant (dans le département de l'Isère, près de Grenoble), la deuxième (lettres 7 à 9), une marche jusqu'à Castelnaudary, pour participer aux manœuvres de la 26e division d'Infanterie.

 

Antony et le docteur Bataille attablés devant un pichet de vin "pagésique"...

Cour de la maison de la Place d'Armes, Beaumont, vers 1900.  

 

 

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Lettre 1

 

(Sans date. Probablement Juillet 1899)

Mes chers parents

Vous me pardonnerez si j'ai retardé ma lettre d'un jour car hier nous ne sommes arrivés à l'étape qu'à deux heures et demie et très fatigués. Le pensage des chevaux nous a occupé le reste de la soirée je n'ai donc pas pu vous écrire.

Laissez moi vous dire d'abord que je vais toujours bien et que ce ne sont pas mes pieds qui souffrent le plus mais bien le porte monnaie qui n'est cependant pas trop malade.

Je vais maintenant vous raconter mon voyage. Nous sommes partis de Clermont à 4 heures du matin. De Clermont à Lezoux la route est très monotone; toujours des champs de blé ou de pommes de terre; il n'y a qu'un seul village, c'est Pont-du-Château. Nous avons fait 27 Km et comme il faisait assez chaud nous étions très fatigués en arrivant. Là presque tout le régiment a été cantonné ; il n'y avait que quelques billets de logement et j'ai eu la chance d'en avoir un: c'était chez une vieille veuve; quand nous sommes arrivés elle nous a reçu comme des chiens dans un jeu de quilles; enfin après avoir gueulé un petit moment elle nous a donné un lit et nous sommes allés nous coucher.

Le lendemain nous quittons Lezoux sans regret et nous partons pour Chabreloche espérant être mieux logés qu'à Lezoux. Nous y arrivons à 10 heures du matin; c'est un village d'une cinquantaine de maisons; nous avons donc été forcés de coucher dans le foin; enfin j'ai bien dormi quand même.

Deux Kilomètres après Chabreloche, le lendemain nous avons passé la borne qui sépare le Puy de Dôme de la Loire, aussi tout le monde s'est mis à chanter et à danser car nous étions sûrs de ne pas être plus mal dans la Loire que dans l'Auvergne, oui mais nous avions un bon bout de chemin avant d'arriver à Boën; nous avons longé la Loire (le fleuve) pendant près de 20 Kilomètres, c'était toujours des montagnes à traverser enfin nous arrivons à Boën avec 38 Km dans les jambes; je n'en pouvais plus il était 2 heures 1/2 et en arrivant il a fallu aller au pensage. Nous avons été logés à l'hôtel et dès que j'ai été libre je suis allé me coucher. Ce matin nous sommes partis à 4 heures 1/2 de Boën, c'est notre plus courte étape, il n'y a que 18 Km, à 8 heures 1/4 nous étions à Feurs; jamais je n'ai vu de route aussi droite, ces 18 Km sont droits comme une règle puis la route fait un petit détour et nous avons une quinzaine de Km en ligne droite pour demain. Ce soir je suis encore logé à l'hôtel.

C'est égal c'est encore assez intéressant les écoles à feu et ce n'est pas si dur que les autres me le disaient, ils se moquaient de moi le premier jour quand je disais que je voulais aller à Chambarant à pied ils ne cessaient de me dire "tu verras...tu verras" Je le vois bien en effet que je marche et que ce sont eux qui se font traîner.

Mais ne portez pas peine de moi je saurai bien me débrouiller pourvu que cela continue.

Adieu chers parents je vous embrasse tous de tout cœur.

Bonjour de ma part à Mr et Mme Fremey.

Voila mon adresse pendant la route:

Antony Pageix

soldat au 36e d'artillerie, 2ème batterie à Clermont (faire suivre)

 

Lettre 2

 

Chambarant le 20 Juillet (1899)

Mes chers parents

J'ai reçu votre lettre hier et j'ai attendu aujourd'hui pour vous répondre afin de vous parler un peu du camp.

Comme je vous le disais dans ma dernière lettre le 13 nous arrivons à Ste Foi l'Argentière où nous sommes cantonnés et le 14 nous avons repos; la nuit du 13 j'ai guère dormi dans le foin aussi je suis allé chercher un lit pour la nuit suivante. Le 15 nous arrivons à Mornan encore cantonnés. Le 16 à Vienne où nous traversons le Rhône pendant l'étape, là nous sommes logés mais chez du monde pauvre qui nous ont fait un lit par terre. Le 17 à Beaurepaire nous sommes logés chez un vieux et une vieille qui nous ont fait souper. Il ne faut cependant pas trop me plaindre car il y en a qui n'ont été logés qu'une seule fois pendant tout le voyage.

Le 18 enfin! Enfin!! nous arrivons à Chambarant. La première chose dont nous nous sommes occupés en arrivant c'est notre lit; nous avons bourré nos paillasses moi j'ai fait la mienne le mieux possible et je m'y trouve aussi bien qu'à Clermont.

Le camp est situé sur un plateau aussi nous avons une très belle vue de tous les côtés, à l'ouest on voit le Rhône et à l'est quand le temps est clair on peut voir les Alpes couvertes de neige.

Quant à moi je vais aussi bien que je puis aller j'ai bien maigri un peu car en partant je pesais 144 (*) et maintenant je ne pèse plus que 136 mais c'est égal c'est toujours 4 Kilos de moins à traîner en chemin. Depuis Ste Foi l'Argentière mes pieds n'ont pas la moindre ampoule, mes souliers ont pris la forme et me vont parfaitement, du reste en route j'avais acheté des patins en corde je les prenais en arrivant et ils me reposaient bien les pieds. Enfin je puis dire que j'ai fait la route sans beaucoup de fatigue et à pieds. Maintenant je ne demanderais qu'à repartir demain pour Clermont.

(*) : ce sont des livres, bien sûr, ce qui fait 72 Kgs.

Quand vous m'écrirez envoyez moi un peu d'argent car mon porte monnaie va se faire porter malade dans quelques jours et j'ai peur qu'il saoit exempté de service.

Adieu chers parents je vous embrasse bien fort.

Bonjour de ma part à Mr et Madame Fremey

Antony Pageix

soldat au 36e d'artillerie, 2ème batterie

Au camp de Chambarant (Isère)

 

 

 

 

 

Photo probablement de Mme Frémey prise à la Place d'Armes et peut-être de Mr Frémey avec la chienne Rigolette (Photo Joseph Pageix vers 1898, négatif sur plaque de verre). Joseph n'a malheureusement pas indiqué l'identité de ces deux personnages. Le supposé Mr Frémey, dont le couvre-chef est à mon avis une relique de son service militaire (une chéchia de zouave?) a un visage assez austère qui n'incite pas à la rigolette, ni à la rigolade! Je ne l'imagine pas non plus en chercheur de champignons. Mais bref, pour un long moment, je n'ai que ces trois-là sous la main...

 

 

Lettre 3

 

Lundi 31 (juillet 1899)

Mes chers parents

Au bout de huit jours de galère je trouve enfin un moment pour vous écrire car depuis dimanche dernier toute la batterie a été occupée de 4 heures du matin à huit heures du soir; pour moi tout le travail que je fais était d'être garde d'écurie, d'aller au balayage, quelques fois au tir pour voir comment on faisait la manœuvre et tous les soirs j'allais au champ de tir pour relever les bons hommes en bois que les obus ont tombé. Enfin voilà le Dimanche c'est à la 3e batterie à faire le travail et j'espère bien que cette semaine sera meilleure pour moi; enfin plus que dix jours à faire au camp et puis nous reprendrons la route de Clermont; il n'y a qu'un endroit où nous sommes bien c'est dans notre baraque: je m'y trouve aussi bien qu'au quartier. Quand nous sommes arrivés au camp il faisait une chaleur étouffante mais il a plu trois jours Dimanche lundi et mardi; le temps s'est refroidi mais maintenant la chaleur reprend comme avant.

Ce qu'il y a de plus ennuyeux c'est la nourriture: nous sommes très mal nourris; je crois qu'on nous donne une espèce de viande caoutchouc; j'y laisserais toutes mes dents et avec çà de l'éternel rata. Pour moi je ne puis manger que de la soupe aussi vous trouverez peut-être que je dépense un peu mais je ne prends que ce qu'il me faut. Quant à mes maux d'estomac je ne les sens bien un peu mais souvent le matin j'achète du lait que je mange avec du pain et avec çà je puis bien attendre la soupe.

Lorsque vous m'écrirez envoyez moi un peu d'argent car je ne crois pas en avoir assez pour jusqu'au départ mais envoyez moi un bon de poste dans une lettre recommandée car il faut trop longtemps pour toucher un mandat mais ayez soin de ne rien faire écrire sur le bon pas même mon nom.

Vous m'aviez demandé ce qu'était mon camarade de lit. Ce n'est pas un chic type; il fallait toujours lui dire de payer sa part aussi je ne mange plus avec lui. 

J'ai reçu la lettre de Joseph l'autre jour et je vois qu'il y a eu des surprises au baccalauréat. Dites lui de donner d'autre détails dessus et dites lui aussi que j'ai trouvé une fusée et un culot des obus des nouvelles pièces.

Au revoir chers parents je vous embrasse tous bien fort.

Antony

 

 

Lettre 4

 

(Sans date)

Mes Chers parents

Je viens de recevoir votre lettre près d'une heure après avoir envoyé la mienne. J'étais très inquiet, car il y avait 12 jours que je n'avais pas reçu de vos nouvelles.

Comme je vous le disais en me gênant un peu j'aurais eu assez d'argent pour aller jusqu'au départ mais si la chaleur continue j'aurais été très juste. Les bons de poste sont bien plus commodes que les mandats aussi lorsque vous m'en enverrez pour la route faites comme aujourd'hui.

La chaleur continue et devient de plus en plus forte; je crois qu'on va faire cesser complètement le travail du soir.

Enfin je ne me fais pas trop de mauvais sang et j'attends patiemment le jour du départ.

Je vous dirai dans ma prochaine lettre le jour où nous arriverons je crois que ce sera le 22.

Au 22 donc chers parents en attendant je vous embrasse tous.

Antony

Sa lettre portant une petite tache brune, Antony a écrit à côté "ça c'est du café"

 

Lettre 5

 

(Sans date)

Mes chers parents

Je n'y comprends plus rien vous me fachiez il y a quelques jours parce que je ne vous écrivais pas assez souvent et maintenant voilà que c'est la quatrième lettre que je vous écris et je n'ai reçu aucune réponse. Je commence à porter peine; il serais donc arrivé quelque chose de nouveau? Ecrivez-moi dès que vous aurez reçu ma lettre, car le temps me dure beaucoup de savoir la cause du retard.

Joseph doit bien avoir le temps de m'écrire. 

Je vous avais demandé un peu d'argent mais je vois que j'en aurai assez pour jusqu'au départ.

Nous partons je crois vendredi matin et nous arrivons le 22; envoyez-m'en pour la route.

Je vous embrasse tous de tout cœur. Antony

Il fait une chaleur étouffante ces jours-ci; on ne travaille pas de 10 h du matin à 3 heures du soir.

Ma colique m'a complètement passé.

 

Lettre 6

 

Remarque: Je pense que cette lettre suit chronologiquement les précédentes. Elle concerne la suite du retour du camp, alors qu'Antony fait halte à la Chaise-Dieu.

La Chaise-Dieu le 18 (septembre)

Mes chers parents

Je n'ai pas encore reçu de réponse à ma dernière lettre mais elle a peut-être eu du retard et je l'attends de jour en jour.

Depuis Hauterive (Ardèche) nous n'avons pas été trop mal reçus sur notre passage; à Satillieu (Drôme) par exemple c'était une fête; la musique du village est venue nous attendre à 3 Km; on avait fabriqué plus de vingt arcs de triomphe dans les rues, tous les hommes avaient des bouteilles à la main et forçaient à boire tous les soldats qui passaient, aussi le soir il y en avait plus d'un qui balançait.

Pour moi j'étais logé chez le maire à dîner: c'était une noce avec 5 plats de viande, des légumes, quantité de déserts et de vins. Le souper valait à peu près le dîner. Mais le lendemain nous n'étions pas à la noce car nous avions une étape de 41 Km par une route très mauvaise qui avait peut-être un pied de poussière; aussi la fourragère les fourgons et les caissons étaient plein d'hommes.

Aujourd'hui nous sommes à la Chaise-Dieu reçus comme des chiens; ainsi, ce matin le capitaine a fait mettre à la porte de l'écurie le patron même de l'établissement où étaient les chevaux. Enfin, chaque pas nous rapproche de Clermont et j'espère bien à Sauxillange et à Vic-le-Comte aller voir mes camarades du séminaire.

Dans cinq jour, nous serons arrivés et ce ne sera pas trop tôt car je commence à être fatigué de cette vie.

Adieu chers parents, à Mercredi, en attendant je vous embrasse tous.                                                                 Antony P

Envoyez-moi un bon de cinq francs pour finir ma route car je n'en aurai peut-être pas assez.

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De retour à Clermont-Ferrand le 22 août (1899), comme il l'avait écrit à ses parents, Antony retrouva sa maison et ses activités. Ses obligations militaires n'en furent pas terminées pour autant, puisque trois ans plus tard, dans une autre série de lettres, datées de l'été 1902, il relate un autre voyage, en direction de Castelnaudary cette fois: départ le 13 août d'Issoire, où était cantonné le 36e régiment, arrivée au camp le 28, et retour le 11 septembre pour arriver à Clermont le 26. Il s'agissait de manœuvres du 16e corps d'armée et de la 32e division. Il était alors Maréchal des Logis, ce qui montre là aussi que son frère Pierre avait raison quand il lui écrivait de Bourges que ce régiment serait plus favorable pour son avancement...

 

Voici l'itinéraire de ce nouveau périple, qu'il établit pour ses parents:

 

 

 

Lettre 7

 

Laguiole le 18 Août 1902

Mes chers parents

Mon voyage jusqu'ici n'a pas été trop mauvais. Le premier jour à Issoire j'ai eu la chance de tomber en billet de logement chez Mr Andraud où j'ai été admirablement bien reçu; ils ont une petite fille gentille à croquer et elle était si contente d'avoir un soldat chez elle qu'elle ne voulait pas me quitter.

Le lendemain nous étions à Massiac où ma foi nous étions moins bien logé mais passe encore. Le surlendemain à St Flour une petite vieille très gentille comme vous avez du le voir sur la carte que je vous ai envoyée.

La ville est perchée sur un rocher, le village qui est en bas est un faubourg de la ville; c'est là que nous étions cantonnés.

Je vous dirais que je me faisais une autre idée du Cantal; je croyais voir un pays dans le genre de nos montagnes. C'est tout le contraire, le pays est très riche, très propropre et les routes mille fois mieux entretenues que chez nous.

Dimanche matin nous partions pour Chaudesaygues. En quittant St Flour nous avons eu le plaisir de recevoir une formidable averse qui nous a trempé jusqu'aux os mais le temps s'est éclairci et en arrivant à Chaudesaygues nous étions complètement secs.

Là par exemple nous avons vu des choses extraordinaires: il y a une source qui donne de l'eau à 86 ° de chaleur aussi les bonnes femmes du pays vont à la fontaine avec des œufs dans un panier à salade, les laissent deux minutes dans le bac et les rapportent cuits à la coque. De même pour faire la soupe elles mettent le pain le sel le beurre puis vont remplir la soupière à la fontaine et la soupe est faite; c'est très pratique.

Nous sommes aujourd'hui à Laguiole dans l'Aveyron, petite ville très gentille mais qui n'a rien de particulier. Pour ce soir, j'ai au moins un très bon lit.

Plus rien de nouveau à vous apprendre pour le moment tout va très bien. Je ne demande que la confirmation; toujours est-il que si par hasard je restais quelques temps sans vous écrire ne portez pas peine, du jour où çà ne marchera plus je saurai vous le dire.

Au revoir chers parents je vous embrasse tous de tout cœur.

Bonjour à Madame Fremey (*) et à ses hôtes.

(*): Tiens, Monsieur Frémey serait-il décédé?

Antony

Quand vous me répondrez ajoutez à l'adresse le nom de la ville où je dois me trouver à peu près au moment où je recevrai votre lettre.

Je vous enverrai de temps en temps quelques cartes postales.

 

Lettre 8

 

(sans date-écrite au crayon)

Mes chers parents

Nous sommes en ce moment à la grande halte et je vous écris sur le dos de mon cheval.

C'est aujourd'hui le dernier jour des manœuvres et je suis tout étonné de me trouver encore vivant car il faut voir les coups que nous faisons pour s'en rendre compte. Ce matin encore il y avait plus de 20 chevaux à terre moi du nombre et tout le monde s'est relevé sans avoir le moindre mal, enfin je vous raconterai çà plus en détail lorsque je serai à Beaumont.

Enfin les 5 terribles jours sont passés et après demain nous reprendrons la route de Clermont. Le temps me dure énormément d'arriver car voilà 9 jours que je ne me suis pas déshabillé.

Envoyez-moi encore 2 ou 3 francs car je n'en aurai pas assez pour arriver jusqu'à Clermont.

À bientôt donc chers parents en attendant je vous embrasse tous.

Antony

Il me semble que la dernière fois je ne vous avais pas donné mon adresse:

Brigadier à la 3ème batterie, 36ème d'artillerie

Aux manœuvres de la 26ème division d'infanterie faire suivre.

 

Lettre 9

 

Najac le 14 (septembre?)

Note au crayon: "Vous aurez peut-être un peu de peine à me lire mais le papier l'encre et la plume ne valent rien"

Mes chers parents

 

Le temps doit commencer à vous durer de recevoir de mes nouvelles car à part les quelques cartes que je vous ai envoyées il y a longtemps que je ne vous ai écrit.

Parlons d'abord un peu des manœuvres: elles ont été terrible, je n'ai pas besoin de vous dire que je suis resté douze jours sans me déshabiller, nous étions continuellement logés dans de petits villages où nous nous trouvions quinze vingt et même trente suivant l'importance du village, par conséquent bien heureux quand nous pouvions trouver de la paille pour nous coucher.

Nous partions le matin à deux ou trois heures pour ne rentrer que le soir à cinq ou six heures. Un jour même nous sommes arrivés à 9 heures pour repartir à 11 h 1/2; vous voyez que la nuit avait été courte. Ce n'était pourtant pas le plus terrible de l'affaire, c'était la manière dont nous étions reçus: les habitants nous exploitaient comme des malheureux, ainsi j'ai vu un boulanger vendre une petite boule de pain  de 2 Kilos 45 sous (remarque: un sou = 5 centimes, donc 45 sous = 2Fr 25, ce qui est effectivement excessif! À Beaumont, ma grand mère me disait: "prends 100 sous pour aller me faire des courses, soit 5 Francs... ); bien plus, ils ramassaient le pain que quelques uns jetaient puis le revendaient. J'ajouterais que celui qui avait acheté les deux Kilos de pain est allé se plaindre à un brigadier de gendarmerie qui a dressé immédiatemment procès-verbal au boulanger. Tous les vivres étaient horriblement chers, les boîtes de sardines de 6 sous se vendaient facilement 1 franc mais nous étions obligés d'en passer par là, attendu que l'ordinaire ne nous fournissait rien. Enfin, bref tout est fini, je n'y pense plus.

À Villefranche de Lauraguais, j'ai rencontré Alexandre; c'était mon ennemi et j'avais bien envie de lui tirer deux ou trois coups de revolver, mais j'ai eu peur de salir mon arme, alors je l'ai épargné (il a eu de la chance). Vous me demandez dans votre dernière lettre quel était mon métier: je suis chargé d'assurer les distributions de fourrage et d'avoine pour les 3 batteries. En manœuvre c'était moi qui l'achetais, le lieutenant s'occupait de la viande et du pain, il aurait fallu me voir marchander, je faisais le connaisseur et pour un différend de deux sous je changeais de fournisseur; en un mot j'étais terrible. Ce n'était pas toujours bien commode de faire mes emplettes car dans le midi même dans les villes, tout le monde parle patois et dans les campagnes très peu parlent et même comprennent le français; il me fallait quelques fois un interprètre pour régler avec le fournisseur. Ainsi, à Albi, j'ai été très étonné de voir dans un bazard une dame très bien mise régler en patois avec la caissière. Vous me demandez aussi des renseignements sur la vigne: il m'est impossible de vous en fournir car cette maladie (nota: le phylloxéra) n'existe pas ou très peu dans le pays où j'ai passé; personne n'a pu me fournir de renseignements à ce sujet. Maintenant nous sommes en route pour Clermont. Répondez moi dans quelques jours et en même temps envoyez-moi un peu d'argent car il m'en manquerait pour rentrer à Clermont: les manœuvres ont donné un coup mortel à mon porte-monnaie. À bientôt chers parents je vous embrasse tous bien fort 

                                                     Antony

 

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Antony Pageix à la ville...Chapeau melon, col glacé et bottines de cuir;

un vrai dandy! (Place d'Armes, Beaumont)

 

 

      

 

Et à l'Armée...(36e d'artillerie) Cheveux et sourcils châtains, yeux bleus clairs.

 

Antony fut libéré du service le 26 juin 1903.

 

5-Et Joseph Pageix? (1884-1942):

 

Joseph Pageix, le cadet des trois enfants, portait le numéro 94 du tirage du canton; engagé pour trois ans le 26 octobre 1903 à la mairie de Clermont-Ferrand, alors qu'il était étudiant, il fut dirigé vers le 36e Régiment d'Artillerie de Campagne stationné à Clermont; il y fut incorporé le jour-même sous le numéro 2876 en qualité de 2e cannonier conducteur.

Sa fiche matricule indique qu'il a le permis moto, et qu'il a les cheveux et les sourcils châtains, les yeux gris-bleu, le front découvert, le nez petit, la bouche moyenne et le menton rond.

Il sera nommé Brigadier le 17 mai 1904, brigadier-fourrier le 1er octobre de la même année, puis Maréchal des Logis le 23 septembre 1905. Il sera renvoyé dans ses foyers le 23 septembre 1906, avec un certificat de bonne conduite.

Il n'en fut pas pour autant totalement libéré du service militaire, puisqu'il fut astreint à effectuer des périodes d'exercice avec son régiment d'appartenance du 4 au 26 mai 1909 et du 19 au 28 juin 1911.

 

 

 

      Joseph Pageix: un beau jeune homme

(cheveux châtains, yeux très bleus)

 

 

6-Pour conclure: la guerre de 1914-1918...:

 

Les trois frères accomplirent ainsi leur service militaire l'un après l'autre: Pierre en 1896, Antony en 1898 (ce qui permit à Pierre de revenir dans ses foyers), et Joseph en 1902. La dernière étape de la vie militaire des trois frères, et pas la moindre, fut la Grande Guerre à laquelle ils participèrent tous les trois quasi-simultanément. Pierre et Antony la firent dans la même unité (4 ème régiment d'artillerie), à l'Echelon Mobile de Réparation (EMDR). Il s'agissait d'une équipe chargée du ravitaillement de leur régiment en matériels et en munitions.

À étudier ainsi de près les règles et les modes de vie des hommes de cette fin du XIXe siècle, on comprend que la morale enseignée dans les écoles, la culture militaire acquise au cours de ces longs services et de ces périodes d'entraînement, et surtout la forme physique de la jeunesse essentiellement rurale, aient pu contribuer à faire supporter moralement et physiquement au soldat des tranchées cette guerre si longue et si meurtrière de 1914-1918. 

Pierre fut mobilisé le 31 août 1914 au 53e Régiment d'Artillerie, puis affecté au 4e Régiment d'Artillerie le 1er avril 1916. Certes, son parcours peut être suivi dans les journaux de marche de son régiment. Toutefois, il est consigné dans l'un de ses petits carnets que j'ai pieusement conservé, où il avait inscrit toutes ses étapes, jusqu'à la Victoire, l'occupation en Rhénanie, et sa démobilisation le 30 janvier 1919 (4). 

 

 

Mon grand père Pierre Pageix en uniforme (guerre de 1914-1918).

 

Je me souviens que mon grand père n'avait rapporté qu'une médaille, celle de la Victoire, décernée à tous les combattants:

 

 

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Antony fut mobilisé le 3 août 1914 et affecté comme son frère Pierre au 4e Régiment d'Artillerie. Il fut nommé Adjudant le 14 avril 1915 et reçut la Croix de guerre avec une citation.

 

croix-de-guerre

 

Joseph fut mobilisé le 3 août 1914 et rejoignit le 36e régiment d'Artillerie le jour même. "Aux Armées" à partir du 6 août, il fut chargé de ravitailler son régiment en fourrage pour les chevaux. Son périple au fil des campagnes peut être retracé grâce aux nombreuses cartes postales qu'il envoyait, quasiment tous les jours, à son épouse Louisa Madeuf, qui séjourna pendant la guerre chez ses parents à Olloix (5).

Joseph photographiait près du front chaque vilage où il séjournait, comme s'il sentait que ceux-ci n'allaient pas rester longtemps indemnes; il prit en particulier des photos d'églises ruinées par les bombardements allemands. Cela l'avait d'autant plus choqué qu'il était profondément croyant.

Il fut démobilisé le 27 février 1919 et l'on peut donc supposer qu'il fit lui aussi un séjour d'occupant en Allemagne.

La médaille de la victoire interalliée lui fut attribuée:

 

medvictoire.JPG

 

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Après l'Armistice, les trois frères, démobilisés à peu près simultanément, rentrèrent en Auvergne en janvier 1919 pour assister au décès de leur père Jean-Baptiste Pageix, survenu le 11 mai de cette année-là. À Beaumont, sa maladie et l'absence de ses trois fils durent grever lourdement le train de vie de la maison, car le travail de la vigne exigeait tout au long de l'année des bras solides...

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7-notes:

 

(1): Église paroissiale Saint-Pierre, église paroissiale Notre-Dame de la Rivière (également appelée église basse), et chapelle Notre Dame de l'Agneau.

 

(2): Les registres matricules ont été tenus par les bureaux du service du recrutement, à partir de la classe 1867. Il y avait un bureau de recrutement par subdivision militaire. Ces registres ont d'abord été tenus selon le format en vigueur pour les listes départementales du contingent, à raison de quatre individus par double page. On est passé, avec la classe 1878, au format d'une page par individu, à raison de 500 fiches par registre. Les registres étaient ouverts lors des opérations de révision des listes du contingent, puis complétés à l'aide des renseignements transmis par les régiments dans lesquels servaient les intéressés. Le personnel des bureaux de recrutement faisaient partie des sections de secrétaires d'état-major et du recrutement (une section par région militaire).

 

(3): Les survivances de l'Ancien-Régime ont la vie dure! Ainsi, je me souviens que ma grand mère Jeanne-Eugénie me disait: "prends 100 sous..." Elle voulait dire 5 francs.  Avant la Révolution, la livre, monnaie de compte, se divisait en 20 sols. L'écu de 5 livres valait donc 100 sols. Cette manière de dire a ainsi perduré pour les francs 100 sous = 5 francs, 20 sous = 1 franc, etc...

 

(4): Ce carnet est un aide-mémoire pour tenir la comptabilité de l'unité. Pierre y a consigné toutes les étapes de la guerre.

 

(5): Ces cartes postales permettent de suivre ses déplacements au cours de la guerre. Le jeune frère de Louisa, Marcel, mourut dès le premier mois de la guerre, le 2 septembre 1914. J'ai retracé sa courte existence dans "Lettre de Joseph Crouzeix aux parents d'un soldat port pour la France: Marcel Madeuf".

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Responsable de la comptabilité au sein de son unité (Équipe mobile de réparation), mon grand père indiquait aussi dans ce petit carnet, véritable aide-mémoire, tous les barèmes en vigueur concernant les payes, les prêts aux soldats, les vivres, le matériel, les chevaux et le fourrage (voir les photos ci-après). J'ai recopié plus loin l'itinéraire qu'il suivit au cours de la guerre, du 16 avril 1916 au 18 janvier 1919.

Le petit carnet aide-mémoire de mon grand père Pierre Pageix.

Il devait l'aider à rédiger ses états journaliers.

 

                                                                           

2-Lettres du service militaire
2-Lettres du service militaire
2-Lettres du service militaire
2-Lettres du service militaire

Pages 1 à 10 du carnet.

Ce carnet indique aussi l'effectif de l'Equipe mobile de réparation (EMDR):

(Avant dernière page):

Gradés montés: 2   /  Hommes non montés: 38 /  Conducteurs haut-le-pied: 2 /  Conducteurs: 10.

-Voitures

1  Avant train: 2 chevaux / 1 Avant train avec affût: 4 chevaux / Voitures de pièces de rechange: 3 chevaux / 1er chariot de parc: 3 chevaux / 2e chariot de parc: 4 chevaux /  3e chariot de parc.

 

(Dernière page):

 

-Effectif de l'EMDR

1 Lieutenant ou S/Lieutenant / 1 Maréchal des Logis-Chef / 3 Maréchaux des Logis / 3 Brigadiers / 3 M.O (Maître Ouvrier Ferrand? ) / 1 canon de 37 / 2 mitrailleuses / 10 canoniers conducteurs / 24 chevaux.

 

Dans son carnet, mon grand père Pierre Pageix inscrivit toutes les étapes du périple qu'il effectua du 15 avril 1916 au 18 janvier 1919 au sein de l'Équipe Mobile de Réparation. L'EMDR étaient chargée d'approvisionner des régiments d'artillerie et devait donc suivre ces unités combattantes dans leurs déplacements. Parmi toutes les unités qui composaient le Corps d'Armée se trouvait le Parc d'Artillerie du Corps, qui regroupait une équipe mobile de réparation (EMDR), dix sections de munitions d'artillerie (SMA) et quatre sections de munitions d'infanterie (SMI). 

 

 

2-Lettres du service militaire

Pages 11 et 12: début de l'itinéraire suivi par Pierre Pageix jusqu'à l'Armistice et l'occupation en Rhénanie.

2-Lettres du service militaire

Pierre Pageix (à vélo) et son frère cadet Antony (à cheval). Photo prise à Chamagne (Vosges) 2e quinzaine de juin 1916.

2-Lettres du service militaire

En permission. Dans son jardin à Beaumont.

2-Lettres du service militaire

Mon grand père au travail, dans sa chambre. Il rédige probablement ses états journaliers. J'aime bien son visage qui respire l'intelligence et la bonté. 

 

 

Transcription du petit carnet:

 

"Parti du dépôt le

15 Avril 1916

Arrivé à Corcieux le 16/4 (9h soir) > Arrivé à la Bolle le 17/4 (1h du matin) Vosges.

Entré au bureau de l'EMDR à St Dié le 18/4 matin Vosges

Parti de St Dié Vosges le 11/6.  

A Bruyeres (quartier Barbazan) le 11 Juin soir

                                                        le 12   "

                                                        le 13   "

A Domèvre Entré au bureau du Commandant du Parc le 14 Juin soir

                                                                                              le 15   "

A Chamagne le 16 Juin, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25 et 26 juin. Visite des Batteries.

Parti de Chamagne le 26/6. Embarqué à Charmes le 26 Juin soir.

Arrivé en gare de Ganne (Oise) le 28 Juin matin et cantonné à Bonvillers (Oise). (Voyage à Breteuil et Paillard). Toujours au bureau du Parc.

Parti de Bonvillers le 15 Juillet 1916.

A Villiers-Vicomte le 15/7 (Somme) > A Guizancourt le 16, 17 et 18/7 > A Plachy le 19/7 (Somme) > A Boves le 20/7.

Au bois de Méricourt Somme le 21 Juillet 1916 et le 22.

Dans un champ à Etinéhem le 25 Juillet.

L'Equipe part seule le 26/7 pour Cerisy-Gailly. Les Sections restent à Etinehem. Antony va à bray (munitions).  

Le 18 7bre 1916 départ de Cérisy pour le Hamel à 7h matin arrivée à 7h du soir à Bougainville.

Départ de Bougainville le 21 7bre 11h du soir.

Embarqué à Prauzel (Somme) le 22 7bre à 11h du matin. Itinéraire: Amiens-Ste Ménehould.

Débarqué à Villers Baucourt (Marne) le 23 7bre à 10 heures. Cantonné à Rapsécourt le même jour.

Part de Rapsécourt le 28/7bre > Arrivée à Ste-Ménehould usine Beauvallet le 20 7bre.

Parti de Ste Ménehould Argonne Marne le 29 Décembre 1916.

Cantonné le 29/12 soir à la ferme de Lalieu (près Noirlieu Marne) d° le 30/12.

Parti de Lalieu le 30/12 7h du matin > Arrivé à St-Quentin les Marais Marne le 31/12.

Passé le 1er Janvier 1917 à St-Quentin les Marais Marne.

Parti de St-Quentin les Marais le 2/1-17 fait le logement.

Arrivé à St-Hutin Marne  le 2/1/17. L'Equipe est logée à St-Léger (sous Margerie) Aube. Tous dans des lits.

Parti de St-Léger sous Margerie le 3/1/17. Fait le logementRoute très dure.

Arrivé à Pouan (Aube) le 3/1/17 soir. Logé dans une maison abandonnée puis chez Monsieur Nacquemouche, Maréchal Route d'Arcis le 4/1/17. (Bon lit). 

Parti de Pouan le 19/1/17. > Arrivé à Longueville Aube le 19/1/17 à 13h (Antony arrivé à 9h).

Parti le 20-1-17 à 5h matin prendre le train à la gare de Mégriny-Méry (Aube) Permission de 7 jours.

Les sections continuent leur route sur Reims.

Je rentre de permission le 3-2-17. Je rejoins à Muizons. Nous partons le même jour 11h nous installer à Gueux Marne 3-2-17.

Je pars le 10 Mars en permission de 4 jours pour voir mon père malade (*). Je rentre à Gueux le 17 Mars. (*: Jean-Baptiste Pageix-Bardin, qui décèdera en 1919 ).  

Parti de Gueux (Marne) le 4 Juin arrivés le 4 au soir dans un champ entre Prouilly et Pévy Marne Je pars le 6 Juin en permission de 7 jours.

A Gueux nous comptons au 7e C.A. (C.A.= Corps d'Armée).

A Prouilly "  au 2e C.A.

" au 38e C.A.

Partis de Prouilly le 6-7-17 > à Marfaux le 6-7-17 > à Bouzy le 7-7-17.

Parti de Bouzy Marne le 18 Juillet > à Coolus le 18 Juillet > à Courtisols les 19 et 20.

Nous partons de Courtisols le 21 à 8h du soir.

Arrivés à Somme-Suippes le 21 Juillet à minuit.

Partis de Somme-Suippes le 16 Septbre matin > à Courtisols le 16-9-17  > à Moncelz le 17-9-17 > à L'Epine le 18-9-19.

Je pars en permission de 23 j de L'Epine, je prends le train à Chalons.

L'Equipe part de L'Epine le 7-10-17 > à St-Mard-sur-le Mont le 7-10-17 > à Chardogne > à Séraucourt le 15-10-17 soir.

Arrivés à Lemmes le 16 Octbre 1917 Meuse.

Je rentre de permission de 23 jours, le 22-10-17 à 6 heures du matin en gare de Lemmes (Meuse).

Départ de Lemmes le 19-12-17 > A Eryze-la-Petite le 19-12-17 > A Mesnil-aux-Bois le 20-12-17 > A Fouchères le 21-12-17.

Partis de Dommartin le Franc le 24-12 > Embarqué à Joinville-en-Vallon le 25-12-17 8h matin.

Débarqué en gare de Vèzelize le 25-12-17 à 3h soir.

Arrivés à Froville le 25-12 9h du soir. La colonne à 1h1/2 le 26-12-17.

Partis de Froville le 1er Janvier 1918.

Je pars 1 jour avant les sections pour aller faire le logement à Dombasle.

La 1ère SMI (Section de Munitions d'Infanterie) reste avec nous

la 2e SMA (Section de Munitions d'Artillerie) va à Raville.

L'Equipe arrive à Dombasle le 2-1-18 soir Meurthe et Moselle.

Partis de Dombasle-sur-Meurthe  le 21 Avril 1918.

A Sexey-aux-Forges le 22-4 > Partis de Sexey-aux-F. le 23-4.

Arrivés à Jaillon Meurthe-et-Moselle le 23 Avril 1918 soir.

Parti de Jaillon le 3 Mai à  ( ) heures du matin.

Embarqué à Toul le 3 Mai. Je pars avec le train  pour le logement. Débarqué à St-Paul (Oise) près Bouvais le 4 Mai 9h30.

A Crillon (Oise) les 4 et 5 Mai > A Thérines le 6 Mai > A Brettancourt le 7 Mai (Somme) > A Villers-Compsart le 8 Mai > A Huppy les 9 et 10 Mai (Somme).

Parti de Huppy le 11 Mai matin pour embarquer à Pont-Rémy-Somme-Débarqué à Clein-Leysèle le 12 Mai à 2h du matin-Belgique-

Cantonné les 12-13-14, et 15 à Arnecke dans une ferme au Cygne Nord.

Partis d'Arnecke le 16 matin > Cantonnés dans une ferme à la bifurcation des routes de Cassel à Steenvoorde, et de Terdegem. Partis de Terdeghem le 2 Juin 1918 Nord > à Hoymille le 2,3,4,5,6,7,8,9,10,11,12,13,14 et 15. Partis de Hoymille le 16 Juin > à Hardifort le 16 Juin .

Partis de Hardifort le 24 Juin > à Terdeghem le 24 Juin > partis de Terdeghem le 9 Juillet > à Warmouth le 9 Juillet.

Embarqué le 10 Juillet nuit > à Bergues Nord > Débarqué le 12 Juillet 1918 à Chantilly (Oise) à 4h du matin.

Logé à Mont-l'Evêque les 12,13,14 Juillet 1918.

Partis de Mont-l'Evêque le 14 Juillet 11 heures du soir.

Le 15 Juillet bivouaqué dans le bois d'Ermenonville.

Le 16 Juillet bivouaqué dans la forêt de Villers-Cotteret Aisne.

Le 16 au soir je pars faire le Cantonnement de l'Equipe à Peroy-les-Combries. L'Equipe arrive le lendemain les sections restent.

Partis de Peroy-les-Combries le 23 Juillet 1918 > à Dampleux le 23 Juillet > à Silly-la-Poterie . Ferme du château Aisne le 1er Août 1918 > à Oulchy-le-Château le 9-8-18. Pris le train (pour Permission 23 jours) à Lizy-s-Ourque le 9 soir > Parti de Vaires-Torcy le 10 soir.

Rentrant de permission je retrouve l'Equipe à Verte Feuille le 7 Septbre 1918 Aisne.

Le 8 Septbre départ pour Pommier > Le 15 Sepbre départ pour Violaine > Embarquement à Villers-Cotteret le 24 Septbre 1918 Aisne.

Débarquement à St Omer le 25 matin Pas de Calais.

Caserne de la Barre à St Omer les 25,26,27,28 et 29.

Au Camp de Néagarer près de Roosbruge les 29,30,1er oct. 1,2,3,4 et 5 Octobre Belgique.

Au Camp de Wippe Cabaret du 6 Octobre au 18 Octbre inclus > à la fabrique de conserves de Egghem-Cappel près de Coolscamp à 10K de Roulers le 19-10 et 20-10-18 > à Iseghem le 5 novbre 1918 > à Waereghem le 5 novbre 1918. Armistice.

Le 17-11-18 Rejoignons le P.A.D. à Biest près Cruishautem Belgique. 

Départ de Biest le 21-11 > Les 22 et 23 Novbre à Mooregem > Le 24-11 à Audenove Ste Marie > Le 25-11 à Borgt-Lombeck > Les 26 et 27 à Woluwe St Lambeck près Bruxelles > Le 28-11 à Tourinnes (Le Culot) sud de Louvains > Le 29-11 à Waremme usine Doyen > Le 1er Décembre à Hollogne > Le 2 Décembre à Seraing Belgique.

Parti de Seraing le 5-12-1918 en permission de 20 jours: Seraing, Liège, Bruxelle, Gand, Dunkerque, Calais.

Retour de permission le 7 Janvier 1919 Je trouve l'Equipe à Hemmerden près de Grèvenbrisch Allemagne.

Le 11 Janvier- visite à Aix-la-Chapelle. Le 16 Janvier visite à Neuss. Le 18 Janvier visite à Cologne. 

 

Mon grand père et son vélo.                                     

 

 

 

2-Lettres du service militaire
2-Lettres du service militaire

Cartes postales expédiées d'Allemagne par Pierre Pageix: le 12 janvier 1919 d'Aix-la-Chapelle:

"Ai fait un très bon voyage à Aix-la-Chapelle dont je t'envoie la cathédrale. Mille baisers à tous PPageix Plus que 11 jours". Le 18 janvier: "J'ai visité Cologne dans tous ses coins et recoins. Je ne regrette pas mon voyage je t'assure. Mille baisers à tous à bientôt. Plus que 4 jours. PPageix".

Même date:

"A Mademoiselle Marguerite Pageix, Beaumont, Puy-de-Dôme: Ma chère Guitte je t'envoie deux vues des rives du Rhin qui sont très bien comme paysage. Bise toute la maisonnée pour moi. Ton papa qui t'aime. PPageix".

 

Lorsqu'il fut en Rhénanie, territoire occupé par nos troupes après l'Armistice, mon grand père fit un périple touristique et visita Aix-la-Chapelle et Cologne. Il écrivit à son épouse (ma grand mère Jeanne-Eugénie) et aux enfants: Paul (mon père) et Marguerite, qui peignait et dessinait beaucoup avec son père, ce qui explique que celui-ci lui ait envoyé un paysage à reproduire. Encore une fois, mon grand père excellait dans la peinture à l'huile et le crayon, tandis que Marguerite, avec un talent naturel, touchait à toutes les formes d'expression: pastel, crayon, plume, sanguine, fusain, gouache, aquarelle, pyrogravure, portraits, paysages, etc. Ils passaient ainsi de longs moment à peindre ensemble.  

                                                                       Jacques Pageix 2013

 

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