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31 octobre 2012 3 31 /10 /octobre /2012 17:42
Tante Isa et autres histoires.

Isabelle Moulier-Bloch

(1883-1973)

--o--

 

Tante Isa et autres histoires.

 

 

1-Sa famille:

 

Isabelle Moulier naît le 18 juillet 1883 à La Vigerie, canton de Murat (Cantal). Son père, Jean Moulier, 24 ans, est instituteur. Sa mère, Thérèse Juillard, est la sœur de mon arrière grand père Jean-Baptiste Juillard de Moranges (Lanobre). Les Mouliers sont installés dans cette localité depuis très longtemps (DEVELOPPER).

 

Mon grand père Michel Marcel Juillard, que l'on voit sur cette photo de famille (debout, deuxième à partir de la droite, entre ses parents) est donc le cousin germain d'Isabelle (assise, deuxième à partir de la droite).

  

 

Une partie du "clan" Juillard. Photo prise vers 1920 à Moranges.

 

Debout au milieu, Jean-Baptiste Juillard (1857-1921), mon arrière grand père avec ses moustaches en guidon de vélo, ou "à la gauloise", si l'on préfère. Il était très sportif et fit son service militaire au bataillon de Joinville.

Son frère Paul (1859-1918) est absent.

À sa gauche, mon grand père Marcel,

puis mon arrière grand mère Hentiette Raoux (1861-1941), et à la droite de Jean-Baptiste, le couple Anaïs Juillard, sa sœur (1866-1950) et Pierre Tyssandier (1864-1943).

Assise en bas à gauche, son autre sœur, Thérèse Juillard (1861-1944), veuve depuis 1916 de Jean Moulier.

Ces deux couples Tissandier et Moulier émigrèrent à Paris où ils s'installèrent en communauté comme fabricants de meubles et de billards au N° 16 de la rue St-Antoine. Thérèse Juillard et Jean Moulier n'eurent qu'une fille, Isabelle, "tante Isa" (2e assise à partir de la droite, à côté probablement d'une amie), mariée en 1912 à Me Edmond Bloch, brillant avocat au barreau de Paris qui devint bâtonnier de l'ordre des avocats (2e assis à partir de la gauche); le couple habitait 78 rue de Rivoli un appartement luxueux avec salle de billard. Ma mère y fit plusieurs séjour au cours de son enfance. Anecdote: le couple surnommait ma mère "Bobotte"; celle-ci, devenue la mascotte de la clientèle, passait par la salle d'attente et annonçait d'un ton solennel: "tonton, c'est pour un divorcement"... Isa et Edmond n'eurent pas d'enfant. Edmond Bloch fut prisonnier à Drancy avec des "juifs intellectuellement influents" tels que Pierre Masse (on le voit dans un télé-film récemment diffusé et dans le livre de Pierre Lazaref sur la 2e guerre mondiale); contrairement à son ami Pierre Masse, il fut miraculeusement libéré, mais ses deux neveux périrent dans les camps de concentration allemands.  

Assise au milieu, tenant son fils Edmond dans ses bras (né à Toul en 1920), ma grand mère Mélanie Juillard, née Serre.

L'enfant en col marin est l'ainé des enfants, Henri (né en 1914), à côté de ma mère Alice (née en 1916). Il y aura ensuite Michel -le futur vétérinaire- (1924), Pierre-le futur général d'aviation-(1929) et Jean-Claude (1934).

Alphonse Juillard (1888-1967), le frère de mon grand père, est absent sur la photo. Ce dernier eut 4 fils, Jean, médecin, ép. Jeanine, également médecin (ils furent tous les deux médecin des maquis pendant l'occupation) , Charles (commerce des Dames de France à Clermont-Fd, place de la Victoire), Robert (ingénieur et industriel), et Maurice. (Charles et Maurice avaient repris l'affaire des Dames de France, cédée par mon grand père à son frère Alphonse).

Est également absente Clémence Juillard, la sœur de mon grand père, mariée à Alexandre Gauthier de Lanobre. Ce couple eut une fille unique, Suzanne Gauthier, "Zézette", Mariée à Pierre Lafforgue, maître-tailleur réputé à Clermont. Quatre enfants: 1-Bernard, polytechnicien, carrière dans le nucléaire, marié à une polytechnicienne, quatre enfants naturellement brillants: Laurent, lauréat de plusieurs Olympiades de maths, médaille Fields 2002 de mathématiques, professeur à l'IHES, membre de l'Académie des Sciences et j'en passe; Thomas et Vincent, universitaires professeurs et chercheurs, tous issus bien sûr de l'ENS. 2-Gérard, maître tailleur à Clermont comme son père. 3-Jean-Claude, Officier supérieur dans l'Armée de l'Air, décédé. 4-Catherine "Cathy", ISP Paris, chasseur de tête qui a fondé un important cabinet de recrutement de dirigeants.

 

J'ai trouvé une autre photo familiale où l'on reconnaîtra les mêmes personnages:

 

À gauche (à moins que ce soit Jean Moulier le père d'Isa), peut-être Paul Juillard le frère de mon arrière grand père Jean-Baptiste Juillard (au centre avec ses moustaches "à la gauloise", au-dessus de l'enfant en blanc). À sa droite Thérèse Juillard, épouse Jean Moulier ; à sa gauche, Edmond Bloch et son épouse Isabelle Moulier. Je n'ai pu identifier les autres personnages. 

 

 

2-Sa naissance le 18 juillet 1883 à Lavigerie (Cantal):

 

Je ne puis mieux faire que de présenter ici "in extenso" son acte de naissance:

 

"L'an mil huit cent quatre-vingt trois et le dix huit juillet à quatre heures du soir, par devant nous Chibret, Joseph, maire officier de l'état-civil de la commune de Lavigerie, canton et arrondissement de Murat département du Cantal est comparu Moulier Jean, âgé de vingt-quatre ans, instituteur domicilié au chef-lieu de la commune de Lavigerie, lequel nous a déclaré que ce matin à dix heures Thérèse Juillard, âgée de vingt deux ans, son épouse sans profession domiciliée au chef-lieu de la commune de Lavigerie est accouchée d'un enfant du sexe féminin qu'il nous a présenté et auquel il a déclaré vouloir donner les prénoms de Marie-Louise-Isabelle, les dites déclaration et présentation faites en présence de Coutel Édouard, âgé de trente sept ans garde-champêtre domicilié au lieu de Lagardilhon en cette commune et de Daldrieux Antoine, âgé de quarante six ans, cultivateur domicilié à Labrige en cette commune, lesquels ont signé avec nous le présent acte après lecture faite.

"Moulier  Coutel  Daldrieu  Le Maire Chibret"

 

 

Je n'ai pas de photo d'Isabelle Moulier bébé.

Seule, sa timbale que j'ai conservée

évoque sa petite enfance...

 

3-Sa jeunesse:

 

Isabelle, ses parents Moulier et ses oncle et tante Pierre Tyssandier et Anaïs (née Juillard) quittèrent l'Auvergne très tôt pour s'installer fabriquant de billard au numéro 16 de la rue Saint-Antoine.

(Ses nombreuses cartes adressées à ses amies qui composent un album...) etcPHOTOS

 

Isabelle (à droite) et une amie vers 1900.

 

 

Isabelle jeune fille.

 

4-Son mariage:

 

Isabelle se marie à Paris le 20 juillet 1912 avec Edmond Salomon Bloch. Il habitait alors 10 rue Saint-Antoine, non loin du domicile de la famille d'Isabelle. Leur rencontre ne fut donc pas un pur hasard.

Les époux s'installeront d'ailleurs à partir du 24 Mars 1913 20 rue Saint-Antoine, dans ce même 5e arrondissement; c'était peut-être l'adresse d'Edmond avant son mariage.  Ils y resteront d'ailleurs jusqu'à leur déménagement dans un appartement cossu du 4e arrondissement, au 78 rue de Rivoli. 

 

5-Son époux Edmond Bloch:

 

(développer) PHOTOS 

Bien sûr, la vie d'Isabelle ne peut être dissociée de celle d'Edmond Bloch. Voici donc quelques souvenirs sur ce grand intellectuel:

 

5.1-Sa famille:

 

Un article paru en Avril 1936, alors qu'il se présente à la Mairie du IVe arrondissement de Paris, évoque ses origines:

"Ses grands parents paternels et maternels, de vieille souche alsacienne, les premiers de Guerstheim (Bas-Rhin), les seconds de Benfeld et Haguenau (Bas-Rhin) se fixèrent à Paris vers le milieu du XIXe siècle. Son père vit le jour le 1er février 1858, 7 rue des Lavandières-Sainte-Opportune et sa mère le 3 Août 1862, 10 passage Pecquay.

"Pendant la guerre franco-prussienne de 1870-1871, ses grands-pères servirent au Bataillon de la Garde Nationale de l'Hôtel de Ville, l'un comme sapeur, l'autre comme garde à la compagnie commandée par le capitaine Louis Méline (Compagnie des bottes vernies).

 

Son frère Lucien, ses neveux morts en camp de concentration (Struthof, Alsace);

 

5.2-Sa naissance:

 

Il naît le 28 Avril 1884 à Saint-Quentin (Aisne), au domicile de ses parents, 123 rue d'Isle:

 

"Le vingt trois Avril mil huit cent quatre vingt quatre à six heures du soir est né rue d'Isle N° 123 Edmond Salomon, du sexe masculin, de Seligmann Bloch, vingt six ans négociant et de Florette Blanche Lévy vingt et un ans, sans profession son épouse. En marge est écrit: Marié le vingt Juillet mil neuf cent douze avec Marie Louise Isabelle Moulier (...)"

 

5.3-Ses études brillantes:

 

Après de solides études au Lycée de Saint-Quentin, il vint à Paris préparer ses diplômes supérieurs; une licence ès-sciences lui fut décernée le 18 juillet 1910, suivie d'une licence en Droit en 1913,  puis il obtint le diplôme de l'École des Sciences Politiques (section diplomatique)!

Dès janvier 1909, et durant ses études universitaires, il fonde et préside l'Association républicaine des étudiants de France qui s'oppose à l'Action française.

 

5.4-Son service militaire:

 

Classe 1904; matricule 1814, caporal en 1905, sergent en 1907, dispensé car étudiant en Sciences.

Tandis qu'il travaillait comme Rédacteur au Ministère des Travaux Publics, il profite de ces trois années (de 1911 à 1913) pour poursuivre des études et obtenir ces trois diplômes! Il emménage le 24 août 1907 dans le quartier Latin, 11 bis rue Lapécède. Il est avocat au Barreau de Paris à partir du 1er décembre 1913.

 

5.5-La Grande Guerre 14-18:

 

Sa bravoure au front fut récompensée par la Médaille Militaire le 2 Avril 1916, assortie de la Croix de Guerre 14-18 avec palme et enfin la Légion d'Honneur (grade de Chevalier) obtenue après la guerre, le 15 Mars 1924: "N'a cessé de servir avec le plus grand dévouement la cause des victimes de la guerre" (il accédera ensuite aux grade d'Officier le 24 janvier 1935 puis Commandeur le 4 Mai 1950).

Mobilisé le 4 août 1914 comme sergent, il combattit du 4 août 1914 au 1er avril 1916; il fut rendu à la vie civile le (...) après avoir été trois fois blessé:

Il fut d'abord blessé le 15 septembre 1914 au combat de Sapigneulle par balle à la jambe gauche. Une citation élogieuse vint ensuite rappeler les circonstances de ses blessures:

"Sous-officier d'une énergie et d'une éclatante bravoure, de dévouement et de mépris du danger. Atteint de 2 blessures au début du combat du 15 septembre 1914 a refusé de quitter son poste et est resté à la tête de ses hommes jusqu'à ce qu'il ait été atteint d'une troisième blessure grave".

Ses blessures le retiennent huit mois à l'hôpital de Hanovre et, après sept mois de camp à Celle, il revient grand blessé, sur des béquilles, en 1916. Il n'a pas la joie de revoir son père décédé quelques jours avant son retour. Son jeune frère Lucien est au front, engagé volontaire dans l'infanterie depuis le 8 août 1914.

Avec une indomptable énergie et un total mépris de la souffrance, il retourne au Palais, s'y fait une place de choix et contribue à la création de la société des anciens combattants et mutilés de guerre.

 

 

 

Du camp de Cellelager ("Baracke" N°28a), province de Hanovre, "Deutschland", où il est prisonnier convalescent, Edmond envoie le 5 août 1915 une carte à sa femme et à sa belle-famille Moulier-Tyssandier, à Paris, 16 rue St Antoine. Il est debout (4e à partir de la droite, mains croisées).

   

Mutilé de guerre avec une invalidité de 40%, on le vit toujours par la suite avec une canne. Il fut élu Président du Groupe de la Seine de l'Association des mutilés de Guerre, fonction qu'il assurera de nombreuses années, comme Délégué de l'Association Générale des Mutilés de Guerre de la confédération Nationale des Anciens Combattants ou Membre de l'Office des Pupilles de la Nation.

 

5.6-L'après guerre: etc

5.7-L'entrée en politique:

 

En Avril 1936, parrainé par Henri Franklin-Bouillon, député de la Seine et Oise, ancien ministre, et Président du Front Républicain, il se porte candidat aux législatives dans le 4e arrondissement; il est battu au second tour par un communiste.

Son hostilité à la politique étrangère d'Aristide Briand.

 

5.8-De la gauche vers la droite:

Son action politique: sa correspondance en 1937-1938 avec Jacques Bardoux sénateur du Puy-de-Dôme (*), son ancien professeur à l'École des Sciences Politiques, où il prédit la montée du nazisme et tout ce qu'il adviendra... (cf. Fonds Bardoux, Arch. du Puy-de-Dôme).

(*): Normalien, élu sénateur radical indépendant du Puy-de-Dôme en 1938,fils d'Agénor Bardoux, le grand père de Giscard d'Estaing, homme politique français né le 25 mai 1874 à Versailles et décédé le 15 août 1959 à Saint-Saturnin (Puy-de-Dôme). Cette correspondance peut être consultée dans le fonds Bardoux des archives du Puy-de-Dôme. Il est un adversaire des communistes, qu'il accuse de vouloir pousser la France à la guerre contre l'Allemagne pour le profit de l'URSS. C'est au cours de ses études de droit à Paris et lors d'un cours passage au barreau de Paris qu'il se lia d'amitié avec Edmond Bloch.

 

Archives du Puy-de-Dôme, fonds Bardoux.

 

5.9-La carrière au sein du barreau parisien:

 

Avocat à la Cour d'Appel, l'appartement au 78 rue de Rivoli (où ma mère et Zézette firent des séjours), les honneurs: bâtonnier de l'ordre des avocats, commandeur de la Légion d'Honneur, Grand Officier Nicham Iftikhar, Officier Ouissam Alaouite, Chevalier de l'Ordre civil de Léopold.

 

Edmond Bloch en robe d'avocat, vers 1920.

 

6-La vie du couple entre les deux guerres:

 

L'achat entre les deux guerres de la maison du Péage, commune de Lanobre, Cantal, acquise en viager de Madeleine Bourguet, qui fut la compagne du Duc de La Force résident au château de Journiac, commune de Beaulieu (cf archives notamment Sicaud-Mariol). Le Duc l'avait meublée (style empire; quelques meubles lit, guéridon etc subsistaient encore en 1973). 

 

 

C'était un ancien relais de poste, installé sur la route de Clermont à Aurillac, autrefois fréquenté par les nombreuses diligences et autres voitures de poste qui assuraient le transport des voyageurs: ils trouvaient au Péage une écurie pour les chevaux, une table pour se restaurer et un lit pour passer la nuit. Si la grande cheminée de la salle commune, où les convives pouvaient s'asseoir sur le "cantou" ou coffre à sel, placé sous le manteau au plus près du foyer, pouvait nous susurrer tous les récits de ses voyageurs et de leurs postillons, quel passionnant recueil de souvenirs pourrions-nous publier!

 

Edmond et Isa venait l'été s'y reposer et on les voit sur de nombreuses photos en compagnie de Madeleine.

 

 

Le Péage vers 1925; de gauche à droite: Tante Isa (Isabelle Mouler épouse Bloch), sa mère Thérèse Juillard épouse Jean Moulier (sœur de Jean-Baptiste Juillard mon arrière grand père), Madeleine Bourguet, alors propriétaire du Péage, Anaïs Juillard épouse Pierre Tyssandier, ma mère Alice Juillard épouse Paul Pageix, et Edmond Bloch. Photo prise devant la maison et son puit avec probablement l'appareil d'Edmond Bloch dont on aperçoit la Torpédo.

 

Madeleine Bourguet était très pieuse; j'ai conservé son beau livre de messe en ivoire...

...où figure sa non moins belle signature en première page.

 

 

À la ville, Edmond et Isa étaient toujours vêtus avec une élégance raffinée...

 

 

 

Le sceau à cacheter d'Edmond Bloch.

 

À Paris, le couple menait grand train; on les voit sur de nombreuses photos sur des bateaux de croisière ou déguisés lors de soirées mondaines. Ma mère se souvenait de leur appartement 78 rue de Rivoli qui comptait entre-autres une salle de billard (noter que la famille d'Isa tenait une fabrique de billard rue Saint-Antoine...). Ma mère y fit de nombreux séjours, étant quasiment adoptée par ce couple sans enfant (ce qui causera probablement leur future séparation). L'oncle la surnommait "bobotte"; il est vrai qu"elle le faisait rire aux éclats lorsqu'elle passait son museau dans l'entre-bâillement de la porte pour annoncer: "Tonton, c'est pour un divorcement"... 

 

Tante Isa (à gauche) avec deux inconnus (pour moi), au cours d'une croisière...

 

...ou lors d'une soirée déguisée.

 

7-La deuxième guerre mondiale:

 

7.1 Son internement à Drancy avec six autres avocats:

On le voit sur cette photo illustrant la une du Petit Parisien. "En 1941, il a 57 ans et pose appuyé sur une canne, indispensable depuis que deux éclats d'obus lui ont emporté une partie de la jambe, en septembre 1914, lors de l'offensive dans l'Aisne".   

De gauche à droite, Weill, Valensi, Azoulay, Ulmo, Crémieux, Edmond Bloch et Pierre Masse, internés à Drancy comme "juifs intellectuellement influents" (sic), arrêtés par représailles contre des attentats dont étaient victimes des allemands. Remarquez les prisonniers qui se pressent aux fenêtres. 

 

 

Son dossier pour l'obtention du grade de Commandeur dans l'ordre de la Légion d'Honneur en date du 10 janvier 1950 évoque cette période:

" Persécuté et poursuivi durant l'occupation allemande, arrêté en 1941 par la Gestapo, relâché le 17 Novembre 1942, à nouveau interné par la Gestapo de l'Avenue Foch, soumis au régime des travaux forcés en camp de travail de la Gare d'Austerlitz, libéré le 18 Août 1944; action morale et patriotique très méritoire à l'intérieur du camp".

 

Il fut reçu dans l'Ordre par Étienne Carpentier, ancien Bâtonnier de l'Ordre des Avocats à la Cour de Paris, Grand Officier de la Légion d'Honneur, Croix de guerre 1914-1918 et 1939-1945, médaillé de la Résistance. Edmond Bloch était alors Président de l'Union Combattante France Belgique.

 

 

7.2 L'occupation allemande et le départ d'Isa pour l'Auvergne en 1941:

 

"Tonton Edmond" resta à Paris, tandis que "Tante Isa" après leur séparation, quitta Edmond Bloch et descendit au Péage. Ce fut une aventure qu'elle nous raconta: transportée dans un camion de la résistance, passage épique de la ligne de démarcation, etc.

Edmond Bloch habita dans ses vieux jours un appartement dans l'Île Saint-Louis avec Renée son ancienne secrétaire où nous lui rendîmes visite ma mère et moi. 

 

8-Mes propres souvenirs de tante Isa et d'Edmond Bloc.

 

Lorsque nous passions nos vacances d'été à Montauriel, nous allions mon frère et moi pêcher à la Jarrige dans la retenue du barrage de Bort-les-Orgues. Cela représentait quelques kilomètres à pied et le dernier tronçon du périple était assez escarpé. Au retour, un peu fatigué, j'aimais m'arrêter chez elle où elle m'offrait invariablement un sirop de grenadine et me racontait une histoire de plus (elle était intarissable...).

Nous rapportions en général à Montauriel de bonnes friture de vairons, goujons, carpes et carpillons dont mon grand père Marcel Juillard était très friand. Nous avions parfois la chance de remonter aussi quelques  écrevisses dans nos balances que l'on trempait dans le ruisseau de Grange après y avoir ficelé en guise d'appât de petit morceaux de viandes arrosés d'essence de térébenthine. 

Elle venait tous les ans en fin d'année chez mes parents à Athis-Mons, d'où elle visitait ses amis (de Saint-Quentin ou Compiègne je ne sais plus). Parmi ceux-ci, se trouvait le couple Jean et "Mimi" Chamant; Jean Chamant était issu du barreau parisien tout comme Edmond Bloch, avec qui il avait fait ses études de droit. Il fut mon Ministre des transports sous Pompidou et il se soucia spontanément de moi auprès de ma mère, après le décès de mon père survenu en 1970, notamment en 1973 pour faciliter mon changement d'affectation de Paris vers l'Auvergne.  

 

 

Cette photo a été prise à Athis-Mons; en 1965, lors d'un séjour hivernal de tante Isa. Ma mère avec son inévitable cigarette (je n'ai aucun grief à cet égard, car je l'imitais notablement) et Jacques Pageix, un polycopié en main, en pleine révision de concours... Derrière moi, l'une des nombreuses bibliothèques de mon père Paul Pageix, lecteur assidu et bibliophile averti (les livres brochés sont les mémoires-journaux de Pierre de L'Estoile).

Tante Isa passait des heures dans ma chambre à me raconter des histoires à dormir debout dont je n'ai malheureusement pas retenu le détail; il s'agissait pèle-mêle de messes noires, d'initiations à la franc-maçonnerie, de séjours dans des couvents où, lors des promenades méditatives dans le cloître, l'on n'ouvrait la bouche que pour se dire: -"Frère, il faut mourir"...etc.

Elle me faisait souvent des cadeaux, tels ce "ducat", cette médaille de Saint-Georges, patron des cavaliers, qui avait appartenu à son oncle Pierre Tyssandier, et cette belle bourse.

 

 la bourse

 

 

  "Ducat" de 1644 de Ferdinand III, empereur des Romains, roi de Hongrie, et de bohème, Archiduc d'Autriche, Duc de bourgogne, Styrie, etc. (1608-1657).

 

 

 

Cette médaille de Saint Georges terrassant le dragon (*) et ce vieux navire accompagnait la montre gousset de Pierre Tyssandier.

(*): L'un des chapiteau de l'église de Lanobre figure Saint-Georges terrassant le dragon.

 

Le Péage vers 1962. La Renault "Frégate" de mon père. Assise sur le banc: ma Mère, tante Isa et ma sœur... 

 

...et de dos, les bras croisés, mon père parlant à tante Isa.

Nota: j'ai été parfois "embauché" pour repeindre les portes et les fenêtres avec leur inévitable liseré rouge...

 

8-La fin de sa vie et son décès, épilogue:

 

Après le décès de ma grand mère Mélanie Serre, le 19 février 1960, mon grand père Marcel Juillard vint souvent trouver un réconfort auprès de sa cousine germaine Isabelle.

Le 13 juillet 1972, tante Isa fit un testament en faveur de ma mère Alice Pageix, née Juillard pour lui léguer la maison du Péage. Elle m'y désignait comme suppléant, ce qui montre qu'elle m'aimait bien. Un an après, le 9 juin 1973, survint son décès. Nous vînmes cette année-là au Péage, ma mère, oncle Edmond et moi, serrés dans la 2CV de ma mère. Ce fut avec émotion qu'Edmond Bloch revit sa vieille demeure. J'admirais une fois de plus cet homme d'une finesse d'esprit et d'une culture hors du commun qui ne manquait pourtant ni de simplicité ni d'humour. Ne me raconta-t-il pas une fois encore le canular d'Hégésippe Simon le précurseur, né à Poil?...Canular qui remonte à 1913...

Edmond Bloch était un fin lettré ; entre les deux guerres, il s'était abonné auprès de l' éditeur Mornay qui avait lancé la série "Les beaux livres", ouvrages à tirages limités et numérotés, destinés à des bibliophiles avertis ; imprimés sur japon ou sur rives, ils étaient magnifiquement illustrés par des artistes réputés (Touchet, Méheut, etc)... Il me laissa ces livres qui  n'avaient pas totalement échappé à l'humidité et aux rongeurs ; après mes quelques restaurations nécessaires, j'ai pu ainsi sauver une petite trentaine d'exemplaires...    

 

 

 

 

Edmond Bloch mourut à Paris le 25 janvier 1975 à l'Hôtel-Dieu. Compte-tenu de ses qualités, son décès fut communiqué par la Mairie du 4e arrondissement au Préfet de Paris.

etc etc

liens Isa avec Lucienne Boyer, chanteuse d'entre les deux guerres.

Jacques Pageix 2018

 

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commentaires

J
Bonsoir Monsieur,<br /> Merci de votre message et de votre bonne appréciation concernant l'article consacré à Edmond et Isabelle Bloch. Je ne l'ai pas souvent rencontré, contrairement à ma mère qui a même vécu dans son enfance, avec le couple qui habitait rue de Rivoli, mais il m'impressionnait chaque fois par ce mélange de bonhomie, d'intelligence, de finesse et d'humour et quelle conversation!<br /> Bien cordialement..
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V
Bonjour, <br /> très belle article sur celui qui fut mon grand oncle Edmond.<br /> Ma mère était la cousine germaine du fils de Lucien, le frère d'Edmond.
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